Articles de yugcib

  • Errances littératoques, 8

    Des vaches naines

    Des oies rouges

    Des canards bec de louche

    Des coccinelles bleues

    Des humains à quatre pieds

    Des cochons éléphantins

    Les vaches parce qu'elles sont naines

    Les oies parce qu'elles sont rouges

    Les canards parce qu'ils ont des becs de louche

    Les coccinelles parce qu'elles sont bleues

    Les humains parce qu'ils ont quatre pieds

    Les cochons parce qu'ils sont éléphantins...

    Tous, oui, tous menés au champ de foire

    Au bâton, à la trompette, en char à âne ou en turbomobile...

    uront-uls au Paradu ?

    Ce Paradu où toute la Crémation veut aller même les moutons cannibales ?

    Avec chacun son fruc, sa gouale

    Et son Égot charpenté en cathédrale et lourd de viande molle

    Et si...

    Pas le Paradu ?

    Et si...

    L'Enfore plutôt ?

    L'Enfore où vont les Ulumunus

    Les vaches éléphantines

    Les oies bleues

    Les canards bec de bite

    Les coccinelles vertes

    Les humains à quatre mains

    Les cochons nains

     

    Le Paradu

    L'Enfore

    Ou le Chatôt...

    Oui, peut-être en définitive

    Le Chatôt

    Le Chatôt sans Chatelin sans ascenseur sans bals masqués ni visages caramélisés

    Le Chatôt plutôt que le Paradu

    Et le Procet plutôt que l'Enfore...

    Le Procet dans la grande salle du Chatôt...

    Le Procet sans Zuse sans couloirs sans verdique et sans gellule- de- roche- avec- juste- un- petit- trou pour laisser passer la poudre...

    Le Procet d'une désespérante éternité et dans un abîme de solitude cosmique, se déroulant comme un tapis de feu, sans témoins, dans la grande salle du Chatôt...

    Les vaches ne devaient pas être naines

    Ni les oies, rouges

    Ni les canards, bec de louche

    Ni les coccinelles, bleues

    Ni les humains, à quatre pieds

    Ni les cochons, éléphantins...

    Toute la Crémation ne devait qu'être feu puis poussière puis olive de roche puis de nouveau feu, poussière et olive de roche...

     

  • Conscience de l'existence de l'autre

         La conscience de l'existence de l'autre ouvre un espace de relation qui n'est plus uniquement fondé sur la seule réalité de notre propre existence. Mais la conscience de l'existence de l'autre n'est pas innée en nous... Elle ne l'est pour ainsi dire jamais, et cependant survient dans notre esprit l'idée de son existence.

    Je ne dis pas que la conscience de l'existence de l'autre, si nous parvenions à l'avoir autrement qu'en idée, ferait ce monde meilleur auquel nous aspirons... Mais je suis certain qu'elle serait alors un facteur déterminant dans l'évolution de notre espèce...

     

  • La dureté du monde

          Il y a dans la dureté du monde en dépit de sa cruauté et de tout le poids dont elle pèse sur nos existences, une certaine beauté. Cette beauté réside dans la faculté qu’ont les êtres vivants à survivre, s’adapter, évoluer, établir entre eux une relation intense et durable dans un environnement hostile. Qu’elle soit une fatalité ou non, la dureté du monde dans toute sa réalité est une nécessité. Sans elle, il n’y aurait jamais cette espérance si belle et si enthousiasmante d’un avenir meilleur, ni cette capacité qu’ont les êtres vivants à évoluer et à se perpétuer.

     

  • Le livre d'Eric Brunet

         Samedi soir, le 21 janvier à "On n'est pas couché", j'ai pris note, en quelque sorte, de l'échange entre Eric Brunet et ses interlocuteurs au sujet de son livre "Pourquoi Sarko va gagner"...

    Une première remarque s'impose, à mon sens : cette formulation dont le premier mot est un mot que l'on emploie d'ordinaire pour interroger, aurait du mal à supporter après "gagner", un point d'interrogation... Pour la bonne raison qu'elle "saute aux yeux", cette formulation ainsi faite, en tant qu'affirmation et non pas en tant que questionnement...

    Il est évident que si Nicolas Sarkozy ne gagne pas l'élection présidentielle, le livre d'Eric Brunet n'aura plus de sens par le titre qu'il porte. Mais qu'il conservera cependant "tout son sens", par ce qu'Eric Brunet écrit au sujet de Nicolas Sarkozy (et qu'en gros il a expliqué sur le plateau de "On n'est pas couché")...

    Ce livre n'est donc pas, à mon avis, un "livre inutile" car il rend compte à juste titre, ou plutôt dans une réflexion non partisane et "éclairée", de "quelques vérités" que les médias (et la plupart des journalistes et des chroniqueurs "de droite comme de gauche" d'ailleurs) ont complètement occultées et cela dans une "entreprise de démolition" telle que l'on n'en avait encore jamais vu à ce point là... Une "entreprise de démolition" donc, orchestrée "à grande échelle" depuis le début du quinquenat de Nicolas Sarkozy.

    Que des organes de presse iconoclastes, portés quel que soit le régime en place sur la caricature, la moquerie, l'humour décapant, à leur manière "démolissent"... ça c'est parfaitement normal, "de bonne guerre" et tout à fait dans l'optique de la liberté d'expression même si cela heurte certaines sensibilités, même si "ça va un peu loin"...

    Mais que toute la presse écrite et parlée, que la quasi totalité des médias, de droite comme de gauche, se livre à une entreprise de démolition systématique d'un personnage en particulier (en l'occurrence Nicolas Sarkozy)... Alors là, je me dis en rejoignant quelque peu la pensée d'Eric Brunet : "Il y a vraiment quelquechose de pourri dans ce pays, et non seulement pourri mais malsain, à la limite de l'inconsistance, de la vulgarité, de la médiocrité culturelle, de style haro sur le baudet on en fait une philosophie quotidienne érigée en religion" !

    Je n'aime pas Nicolas Sarkozy et quoiqu'il arrive (par exemple s'il est au second tour avec Marine Le Pen) je ne voterai pas pour lui, et m'abstiendrai-je... Mais quand Eric Brunet dit que la Maison de L'Amérique Latine dans le quartier latin à Paris, est un lieu très sélect et fréquenté par des intellectuels riches... (là où François Hollande a fêté son résultat aux primaires socialistes)... Je me dis au fond de moi, que la maison de l'amérique latine au quartier latin vaut bien d'une autre manière, le fouquet's sur les Champs Elysées... Sauf que là, en l'occurrence en octobre 2011, la "caste médiatique n'en a point fait un fromage" !

    Vous me direz après tout, que "tout un chacun" c'est à dire le citoyen lambda comme le personnage charismatique et connu du public, peut bien fêter où il veut comme il veut avec qui il veut, ses succès, et selon ses goûts, ses fréquentations, ses moyens financiers, ses sensibilités artistiques ou intellectuelles...

    Mais ce qui me fait réfléchir, c'est la manière dont ce "genre d'affaire" est présenté... ou occulté, car au delà d'un sentiment d'indignation si partagé soit-il par des milliers de gens, il y a cette "symbolique" qui s'impose comme un leit-motiv sans cesse repris en choeur et asséné en permanence et que l'on inscrit même dans l'Histoire...

    Ne devrait subsister en l'occurrence que l'indignation, la seule indignation par elle-même, dans la mesure réelle de cette indignation... Et non pas cette "symbolique" qui n'est rien d'autre qu'un culte rendu à une forme de médiocrité culturelle fondée sur une vision partisane et sectaire du monde selon des clivages...

    Que ce soit au Fouquet's pour Nicolas Sarkozy en mai 2007 ou à la maison de l'Amérique Latine pour François Hollande en octobre 2011... Ou pour quiconque d'ailleurs en n'importe quel lieu "branché" ou non, sur n'importe quelle scène publique ; lorsque l'on fête quelque chose d'important dans sa vie... Ce qui a une signification aux yeux des observateurs que nous sommes, citoyens "Lambda" ou personnages en vue ; ce sont les gens que l'on invite et dont on s'entoure habituellement... En général ce sont presque toujours des personnages "d'une seule et même caste, d'une seule et même famille de sensibilité ou de vision du monde, d'un même milieu social"... (il y a rarement de la "diversité", diversité dont beaucoup de personnages politiques, d'écrivains, d'intellectuels et d'artistes se réclament d'ailleurs afin de paraître au mieux de leur crédibilité)...

    Mais comment, à bien réfléchir, pourrait-il en être autrement, conditionnés que nous sommes par la réalité incontournable qui est celle de sensibilités inconciliables en situation d'opposition et d'affrontement... Ou au "mieux", d'indifférence ?

    Tant qu'il y aura des Fouquet's, des maisons de l'Amérique Latine ou de la Chimie, tant qu'il y aura des cénacles, tant qu'il y aura des partis, tout comme tant qu'il y aura des hommes... Il n'y aura que cette Histoire qui à vrai dire, s'écrit toute seule alors même que les hommes croient l'écrire eux-mêmes selon que cela les arrange à telle ou telle époque ou en telle situation provisoire ou durable...

     

  • A quand Marine Le Pen chez Laurent Ruquier ?

    ... Le samedi 18 février 2012 donc, aux dernières nouvelles ?

    L'on sait, oh combien "de notoriété publique", à quel point Laurent Ruquier est peu disposé à inviter sur son plateau de télévision, Marine Le Pen... Et l'on peine à imaginer la "séance" !

    Cela dit, Laurent Ruquier à mon avis, "à sa façon certes, saura gérer"... De telle manière que cela ne se soldera pas, d'un côté ou de l'autre, par "un procès au cul en bonne et due forme" (il y a déjà, je crois un procès en vue contre Laurent Ruquier au sujet d'un arbre généalogique caricatural de Marine Le Pen)...

    Tout l'art d'un humoriste "de talent" je précise... consiste à se servir des "outils consensuels" en matière de communication médiatique et de joute oratoire, tout en faisant passer sa "touche personnelle" d'indépendance d'esprit, de dimension d'humanité, d'intelligence et de sensiblité... Autrement dit, s'exprimer et réagir en utilisant les "ficelles" du Système mais sans se compromettre, sans tomber dans le "troudebalisme", l'outrecuidance, la vulgarité, la violence "bête et méchante" ou dans toutes sortes de dérapages incontrôlés... Sur l'ensemble de ces critères que je viens d'énumérer, je ne pense pas que Laurent Ruquier soit vraiment "un génie" en la matière... en ce sens que "l'on peut mieux faire"... Par exemple, Raymond Devos "savait mieux faire"...

    ... Donc, pour résumer l'affaire, disons qu'en définitive et que très probablement, Laurent Ruquier saura gérer... Par contre, il y en a une qui m'inquiète un peu, c'est Audrey Pulvar... (à mon avis, y'aura avec elle, en face de Marine Le Pen, quelques petits dérapages)...

    Natacha Polony, quant à elle, me semble "mieux taillée" en l'occurrence...

     

    ... Je fais le pari que, ce soir là, entre 22h 50 et 2h de la nuit, tous les forums du Net seront désertés pour cause de présence devant la télé à "On est pas couché"... Par contre, les mêmes forums seront complètement saturés à partir du dimanche matin... Et plus que jamais en l'occurrence, on aura une idée alors, de la manière dont les gens s'expriment, dans ce beau pays de France (je ne vous dis pas les millions de commentaires qui fleuriront sur les blogs, sur facebook, dans les forums grand public)...

     

    ... Bah, un jour ou l'autre ... que ce soit -soit disant- le 21 décembre 2012 ou un autre jour d'une autre année... Il y aura bien, comme je dis à la fin de mon livre "Grand Hôtel du Merdier", une géante gazeuse qui viendra bouffer le système solaire, et Téterre... Et toutes ces conneries dont on se gave en donnant des coups de bâton partout ou en roulant ses grosses mécaniques ou en faisant péter du fric sur la tête des pauvres !

    Et quand je dis "une géante gazeuse" en fait c'est une image pour évoquer en définitive n'importe quel évènement cosmique d'une violence telle que toute forme de vie disparaîtrait sur la Terre, que ce soit dans 10 milliards d'années ou au 21ème siècle ou dans un an ou dans cinq cents ans...

     

  • Crevettes sauvages

        Les crevettes sauvages cuisinées par les grands chefs du restaurant de l'hôtel Royal Palm (Ile Maurice)  à l'attention de Monique et de Jack Lang pour le dîner de Noël 2011... Avaient-elles des fragrances de sexe sale ? Sûrement pas comme les crevettes de grande consommation  vendues en grande surface au Français Lambda à 1300 euros par mois au budget de 600 euros cadeaux compris pour les fêtes de Noël Nouvel An...
    Une note, d'ailleurs, "assez salée" pour Monique et Jack Lang lors de leur séjour "de rêve" dans un palace de l'Ile Maurice fréquenté par des banquiers, des financiers, des acteurs célèbres et tous les caïds d'une pègre planétaire ultra friquée... Douze mille euro, ce n'est pas rien !
    Etaient présents outre Jack Lang et son épouse, au Royal Palm... et auprès de  ces derniers d'ailleurs, le financier Marc Ladreit de Lacharrière et l'actrice Sandrine Kiberlain...
    Vous me direz : le Royal Palm de l'Ile Maurice, c'est moins proche de nous que le Fouquet's !" (on n'est même pas dans le même hémisphère de la planète)...
    Chirac y avait bien été, aussi, au Royal Palm... Et d'autres encore... Mais peut-être pas Marine Le Pen ni Jean Luc Mélenchon... Quoique Marine Le Pen en ait certainement les moyens, bien plus que Jean Luc Mélenchon...
    Dans les parages, rappelons que nous avons dans cette partie du monde, dans l'Océan Indien, hémisphère austral, et proche de l'Afrique, l'Ile-Continent Madagascar, l'un des  pays les plus pauvres et les plus assistés de la planète... Mais dont le sous sol regorge d'or, de pierres précieuses, d'uranium, de graphite, de bauxite, de nickel, de fer et de plomb ; dont les paysages sont couverts de rizières et de vanilliers, dont les réserves de pétrole sont prodigieuses, dont les parages maritimes grouillent de poissons et de crustacés et dont les cinq mille kilomètres de plage sont paradisiaques...
    Comment est-il possible d'être aussi pauvre dans un pays qui est à lui seul une aussi immense arche de Noé à la biodiversité phénoménale?  Et c'est là, en des lieux retirés, ultra sécurisés et  très bien équipés, dans des propriétés appartenant aux plus grands caïds de la planète, qu'ont lieu des congrès de grands décideurs, d'organisations politiques et de groupes financiers ; des séminaires d'actionnaires ou de membres de la CIA...
    La plus grande partie de l'aide internationale accordée à ce pays, Madagascar, ne profite absolument pas aux populations locales qui vivent, elles, dans une grande et profonde misère...  Et n'est pas non plus investie pour le développement économique de ce pays, car tout l'argent qui arrive ne sert qu'à entretenir une corruption généralisée dont profite toute une caste de privilégiés dotée de police et de gens de gouvernement...
    Madagascar et quelques autres pays "pauvres" (ou devenus ou devant devenir pauvres) sur cette planète, sont à vrai dire un immense champ d'expérimentation pour un "nouvel ordre mondial" encore bien plus déséquilibré et plus injuste que l'ordre prévalant aujourd'hui, un ordre mondial dans lequel il n'existera plus aucune démocratie nulle part, mais qui sera fondé sur la possession de tous les territoires dotés des plus grandes richesses du sous sol, par les nouvelles dynasties et puissances de cet ordre mondial... 
    ... Ayant toujours eu la "mauvaise habitude" de trop approcher mon nez au dessus des crevettes dans les hypermarchés, désormais, depuis cette histoire de crevettes sauvages pour le dîner de Noël de Monique et de Jack Lang...  je vais humer avec des narines encore plus frémissantes et écartées... et... forcément percevoir "quelque fumet de sexe sale" !
     

  • Une feuille de platane...

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    ... Incroyable mais vrai ! Une feuille verte, encore toute verte de l'été dernier, sur une branche de platane, en Haute Chalosse dans les Landes, un mardi 10 janvier 2012 !

     

  • La révolte des Plouques, texte audio

    https://skydrive.live.com/redir.aspx?cid=9d31f6efb6d490a4&resid=9D31F6EFB6D490A4!452&parid=9D31F6EFB6D490A4!102

    Ce texte à écouter est tiré de mon livre "Petits Contes Yugcibiens".

    Durée environ 15 minutes.

    Cliquer sur le lien, puis sur le titre apparaissant en surbrillance, et ouvrir ou enregistrer, et le fichier audio MP3 arrive...

     

     

  • Autour d'un verre

         Que de sujets de discussions dans le genre « autour d’un verre » sur le Web via les forums et les réseaux sociaux !

    Au temps de Flaubert et de George Sand, de Verlaine, de Rimbaud et des Impressionnistes, il y avait les cafés littéraires, les clubs, les salons et les cabarets où l’on se rencontrait… Certes l’absinthe pouvait couler à flots, relayée par quelques « pétards » et fumées de pipes ou de cigarettes ; l’on y « refaisait le monde », l’on s’y présentait les derniers poèmes ou projets de livres… L’on y escagassait les bourgeois, les convenances et la médiocrité de l’époque et l’on y cabalait de tout son esprit, de sa verve et de ses pamphlets.

    Mais c’était là un autre temps que le nôtre ! Avec les mêmes déserts relationnels, les mêmes solitudes, les mêmes exclusions, les mêmes misères qu’aujourd’hui cependant…

    De nos jours, il y a les forums du Web, les sites et les blogs… Avec son petit verre, son absinthe, son "petit noir"virtuels, en face de l’écran ! Il faut certainement -enfin peut-être- plus de talent, d’imagination, de flamme d’esprit et de cœur, de gravité et d’humour, de mots à trouver dont on discerne le ton et la voix ; de « smiles » et d’art de la ponctuation… Pour pallier à l’absence des visages, des regards, des gestes, des sourires, du son de la voix...

    Dans la communication virtuelle par e-mail et par forum, même en collant sa photo ou son avatar, il doit falloir à mon avis un talent qui n’existe pas, tout un art à inventer, pour concurrencer ces rencontres d'hier et d'aujourd'hui dans les cafés et les cabarets !

    Si l'on peut rêver d’avoir ce talent, et quand bien même l'on parviendrait à l'avoir, à quoi servirait-il donc, ce talent, tout seul que l'on peut l'être en définitive, devant un ordinateur ou un i-phone dans une pièce fermée, dans un espace public où vont et viennent des centaines de gens, en tout lieu où ne se font pas ou se font très aléatoirement, de rencontres véritables ?

    Si la beauté de ces âmes que l'on perçoit ou que l'on croit percevoir et que l'on a tendance à surdimensionner, à la seule lecture de quelques lignes d'un interlocuteur dans un forum ou d'un "ami" sur Facebook, nous peuvent donner de si belles nuits ou de si clairs matins, nous inspirent les mots que l' écrit, nous peuvent émouvoir comme un garçon de 15 ans amoureux de sa première fille… Le "petit verre dans le cœur" et les regards imaginés, seul en face de l’écran de l' ordinateur…Valent-ils de vrais regards autour d'un vrai petit verre à la terrasse d'un café ? Ou même -et c'est peut-être par là que commence l'essentiel de la relation- valent-ils ce regard d'une seule fois, ce regard de passage, ce regard que l'on a donné et qui a été perçu et dont le souvenir persistera?

    Les mots peuvent beaucoup mais n'ont pas d'ondes... Alors il leur faut de l'écrit que l'on peut lire soit dans des livres soit sur Internet... Internet censé avoir "en partie résolu" le problème de la communication en abolissant le temps, la distance et l'absence de présence physique...

    Les mots ne produisent pas d'ondes mais seulement (et ce n'est pas neutre) des "effets"...

    Le regard, la voix, le geste, la main, le visage, et d'une manière générale tout ce qui émane de l'être, tout cela oui, a des ondes, émet des ondes...

    Et les ondes traversent peut-être mieux que les mots, que les simples mots écrits... le temps, les distances, les espaces, les écrans, les murs, les absences...

    Les ondes "voyagent" et donc se propagent, bien mieux et avec davantage de portée réelle, que les mots ou que les images de mots...

     

  • 2011

         Le regard que je porte sur cette année 2011 qui se termine, est assurément un regard complètement désabusé...

    Au début, dans les mois de janvier et de février, avec les révolutions Tunisiennes et Egyptiennes, suivies par d'autres révolutions dans le monde Arabe, je suivais avec un certain enthousiasme ces évènements "historiques" à peu près de la même manière qu'un observateur de la France de 1789 aurait suivi l'actualité et les évènements de la révolution Française dans la réalité sociale, politique, intellectuelle, économique, religieuse, de l'époque... Et je me disais "qu'il en sortirait bien, de ce mouvement révolutionnaire dans le monde Arabe, un monde nouveau, et que le monde entier en général, devrait désormais compter avec cette réalité nouvelle des révolutions Arabes"...

    Cependant, quelques mois plus tard, avec la guerre civile en Lybie, le maintien au pouvoir des militaires et des mêmes classes dirigeantes en Egypte, les massacres en Syrie, au Yémen et de nouveau récemment en Egypte ; les élections générales en Tunisie, au Maroc, en Egypte, dont le résultat fut de porter au pouvoir, des religieux... Et la "Charia" en Lybie... Je me suis dit alors " que c'était comparable et aussi dramatique, au vu du résultat, que ce qui survint à la fin de la révolution Française avec la période de la guerre Vendéenne, de la Terreur, puis du Directoire et ensuite de l'empire Napoléonien jusqu'à la Restauration en 1814...

    Rien, absolument rien de "nouveau" (et j'entends là "nouveau" : une immense et générale aspiration et espérance des peuples à tenter une expérience de vivre ensemble pour le mieux)... Ne sortira finalement jamais, de cet abominable "merdier planétaire" !

    Le monde "civilisé" ( et je pèse d'autant plus ce mot "civilisé" de tout ce qu'il a de dérisoire ) se vante d'avoir cette année en 2011, tué deux affreux dictateurs, à savoir Ben Laden et Kadhafi... Mais la dictature des marchés financiers, la dictature des maffias locales, régionales et internationales ; la dictature de l'argent qui afflue et circule et se dépense à partir des mêmes places fortes imprenables et dans les mêmes circuits ; la dictature des modes de consommation de produits de loisir et de culture et de toutes sortes de denrées et équipements, la dictature des idéologies et des fanatismes religieux... Oui, toutes ces dictatures là, d'ailleurs inextricablement entremêlées les unes dans les autres, n'ont jamais autant exercé leur autorité, leur emprise, sur les peuples de toute la planète !

    2011 c'est aussi le drame de Fukushima au Japon, la "grande peur" du nucléaire (pratiquement au même niveau que la "grande peur" des années 50 du 20 ème siècle au sujet de la bombe atomique des Russes et des Américains)...

    2011 c'est l'année où pour la première fois vraiment, les scientifiques et les géographes ont "mis sur la table preuve à l'appui", des données et des réalités absolument incontestables, sur l'environnement naturel partout sur notre planète (climats, ressources, végétation, océan, atmosphère, sols, vie et espèces animales)...

     

    ... Alors, pour 2012, eh bien "advienne que pourra, et vaille que vaille" !

     

  • Comme dans un grand jeu de société où les joueurs placent leurs jetons

         Le caractère aléatoire des relations humaines est une réalité que j'intègre tout naturellement dans mon esprit... Mais peut-être pas aussi naturellement lorsqu'il m'arrive de manifester une trop vive affection à l'égard de quelques personnes qui me sont relativement proches (famille, amis ou connaissances)...

    Ce qu'il y a d'aléatoire dans les relations humaines est donc (et a toujours été) une réalité en tous temps, en tous lieux...

    Mais ce qui est nouveau depuis déjà quelques années en ce début de 21ème siècle, c'est une accélération de la fluidité dans les relations humaines. Une fluidité qui rend la relation encore plus incertaine, et donc plus aléatoire...

    Et c'est bien là ce qui "déconstruit" tout un édifice de pensée fondé sur l'idée que la relation humaine reposerait sur des fondations lui assurant une assise et une stabilité, et aussi une consistance...

    Une fois cet édifice "déconstruit" – ou ébranlé- vient alors l'impression de se sentir conduit de force sur les marges d'un territoire dont le sol se fracture ou même se transforme en une sorte de marécage.

    Ce sont sans doute des liens nouveaux et beaucoup plus nombreux, ayant proliféré et s'étant entremêlés, dans l'environnement de chacun, qui ont contribué à rendre encore plus aléatoires et plus fluides les relations humaines...

    Qui aujourd'hui n'est pas sans cesse sollicité par tout ce que l'univers de la consommation, des modes, des loisirs, de l'information et de l'actuaité, véhicule en continu ?

    Il n'a jamais existé autant de réseaux sociaux, d'associations, de clubs, et de toutes sortes de possibilités pour les gens, de se rencontrer, de communiquer... Et tout cela de surcroît, “maëlstromé” sur le Web...

    Les liens se multiplient et s'entremêlent au point d'enserrer les êtres dans un filet dont ils ne peuvent plus se dégager...

    Alors la vie des gens devient un véritable “parcours du combattant” avec force compétitions, course au succès et à la performance, défis impossibles et embûches innombrables...

    Les gens se dispersent dans des rêves qui se décolorent et dans des aspirations qui les dépassent, ne se donnant guère, le plus souvent, les moyens nécessaires à la réalisation de leurs projets...

    Ce sont des intérêts personnels et égoïstes qui les incitent à propulser ce "monde en eux" dans un univers virtuel constellé de mirages ou d'images en "trompe l'oeil"... Et qui les éloignent, en fait, des autres, et en premier lieu de leurs proches...

    L'air du temps” est dans l'immédiateté, dans l'émotion de l'événement présent, dans une fluidité relationnelle qui s'écoule en eau de lavage comme par le trou d'une baignoire...

    Ne plus se voir, ne plus se parler, ne plus se répondre... La relation insensiblement “glisse” vers le silence puis vers l'indifférence et l'oubli... Et le “maëlstrom” du Web “n'arrange pas les choses” puisqu'il multiplie à l'infini les images en "trompe l'oeil" et ne cesse d'ouvrir des passages ressemblant à des tunnels lumineux qui tournent en rond et ne mènent nulle part...

    Ainsi avançons nous indifférents dans la rue ou dans les lieux publics, à la présence cependant réelle de chacun de ces visages qui passent et auxquels nous n'accordons à aucun d'entre eux le moindre regard... Et aventurons nous dans des espaces de communication virtuels, comme dans un grand jeu de société aux règles définies mais à vrai dire bousculées... Un jeu de société où l'on prend place sans devoir attendre son tour, sans être invité, et sous une effigie censée nous représenter mais qui bien évidemment n'est pas un vrai visage comme le visage qui passe dans la rue...

    Comme dans un grand jeu de société où les joueurs placent leurs jetons... Rien ne va plus, l'on y gagne un coup sur deux ou sur vingt ou sur cent, et les autres fois, toutes les autres fois indéfiniment, c'est du vent que l'on y gagne...

     

  • Pensée du jour, 21 décembre 2011 :

    S'il fallait se résoudre à vivre pauvre mais en vivant mieux, alors j'en serais très heureux...

     

    En effet nous sommes un milliard sur cette Terre à vivre riche mais mal, et, tout en vivant aussi riches que nous pouvons l'être mais aussi mal en vérité, nous contribuons à faire mal vivre six milliards de pauvres...

     

    Un jour, les pauvres de toujours, ayant pour la plupart d'entre eux, observé que les riches d'un certain nombre de pays, vivaient mieux nantis, se sont dit qu'eux aussi pouvaient vivre mieux nantis... Alors ils ont commencé à faire ce que les riches d'un certain nombre de pays avaient déjà fait avant eux...

    Et qui peut en toute justice reprocher à ces pauvres de toujours, d'aspirer à être plus riches ?

     

    Le drame de notre époque, c'est que la pauvreté s'installe dans la richesse, ou plus exactement dans une richesse de plus en plus avariée dans laquelle cependant on continue de se repaître avec avidité... Et que la richesse là où elle s'installe et s'étend quelque peu là où auparavant elle n'existait pas, fait en vérité vivre mal avec l'illusion de vivre bien...

     

    ... Par exemple : un garçon de 15 ans dans un village du Mali ou du Niger roule sur un scooter et va sur facebook avec son téléphone portable, et bouffe du poulet Européen à bas prix : est-ce cela vivre mieux ?

    ... Ou encore : trois ou quatre pinards différents lors d'un repas de famille, de fête, de réunion d'amis ; une promo à Carrefour Market pour du Homard à l'Américaine, une nouvelle console de jeux pour le fiston de 9 ans... est-ce cela vivre mieux ?

     

    ... Ou, "autre chose encore" :

    Décréter être capable de dormir à la dure, de se laver au ruisseau... En bons "Occidentaux" que nous sommes y compris les "non occidentaux acquis à l'occident"... est-ce cela, aussi, vivre mieux ?

    ... Il "me fait rire" ce monde : tous ces riches qui jouent aux pauvres, et tous ces pauvres qui singent les riches !

     

  • La montagne de l'âme, de Gao Xinjian

         Romancier, dramaturge, metteur en scène, critique littéraire et peintre, Gao Xinjian, né en 1940, est réfugié politique à Paris depuis 1988. Son oeuvre foisonnante en fait l'un des plus grands créateurs de notre temps.

     

    "La montagne de l'âme" est sans doute à mon sens, l'un des plus grands chefs d'oeuvre de la littérature contemporaine...

    À lui seul, de toute l'oeuvre de son auteur, ce livre a justifié l'attribution du Prix Nobel de Littérature en l'an 2000. (En fait "La montagne de l'âme" est son livre le plus connu, mais Gao Xinjian est également l'auteur de nouvelles, de poèmes, et d'un opéra "La neige en Août")...

    Un livre surprenant, où l'on se laisse aller, ou plutôt conduire à travers paysages, lieux, légendes, personnages ; où l'imaginaire et le réel semblent ne plus avoir de frontières précises...

    Il n'y a pas vraiment de trame ni d'intrigue ni de suite organisée, mais du vécu, de l'exprimé, de la confidence, de la douceur, de la liberté, du pensé... et des personnages émouvants. Et ce tutoiement comme si l'auteur s'adressait lui-même à son lecteur par l'intermédiaire du personnage du livre...

    Ce qui m' a interpellé dans cette oeuvre, dirais-je, presque "sculpturale", c'est ce dédale de galeries en pleine nature où l'on est emporté comme sur des voies d'eau aux rives féériques, comme dans une sorte d' "asiatique marais poitevin"...

    Un livre qui se lit et se relit...

    Où l'on est loin du "sens commun", où nous est suggéré l'existence d'un "passage" non pas vers un monde meilleur ou un "différent" hypothétique, mais vers ce monde qui est sans doute en nous, que nous devons apprendre à connaître et qui a toujours existé ; et qu'aucun pouvoir en place et en force ne peut rayer de la carte...

     

  • Il bâtit, bâtit bâtit...

    Il bâtit, bâtit bâtit...

    Bâtit son nid...

    Il a 30 balais...

    Un double équateur de bourrelets, déjà, oui, à 30 balais, entre son Sud Fesses-Pattes et son Nord Caisse-Tronche.

    Il a signé un prêt bancaire... de 20 berges... presque hésité sur 25.

    Mais 5 ans de plus, ça faisait pas le crépi ni la véranda en sus.

    20 berges... Il va la payer jusqu'au DEUG de son fiston, sa baraque, s'il a pas fait un infarctus avant...

    Quatre fois le prix qu'elle aurait coûté, lotissement " Les Alouettes ", s'il avait pu la bâtir sans signer le prêt... ( en héritant, par exemple )

    Il est cadre moyen dans une boîte qui vend et achète, se restructure et fusionne avec une autre boîte.

    Sans battre de l'aile, la boîte affiche un bulletin de santé qui laisse présager une restructuration...

    Autant dire que, tous diagnostics confondus, même si pour le trimestre à venir la conjoncture est favorable, les directeurs, pressés par leurs cohortes d'actionnaires, vont exiger un dégraissage en matière de coûts salariaux...

    Il quitte " Les Alouettes " à 7 plombes du mat', se tape 40 bornes avec sa caisse pour aller bosser et la boîte encore lui demande de crapahuter dans les embouteillages, sur les voies de contournement et dans les dédales des ensembles pavillonnaires de la mégapole voisine, peut-être 100 bornes, autant de rond-points et de feux tricolores, afin de négocier des contrats juteux, de débrouiller des affaires complexes...

    Il sera de retour aux " Alouettes " à l'heure du journal télévisé, avec sa Mégane. Vanné, pompé, saturé d'objectifs commerciaux, l'estomac chargé de nourritures bavantes et coulantes ou conditionnées en barquettes ou encore, s'il a pu aller au resto, tout confit d'un plat du jour plantureux ; la tête bouffée par son boulot à la con qui consiste pour l'essentiel à fourguer à des tas de gens des produits et des services superflus.

    Les " com ", par les temps qui courent, ça douille pas des masses et ça paie pas le dernier modèle d'ordi ou de camescope haut de gamme..

    Il a son samedi... Tout de même !

    Mais le samedi, c'est pour les courses, le matin, entre 10 heures 30 et midi, à Carrefour ; et la tondeuse, 1200 mètres carrés, l'après-midi, après la sieste du voisin, de préférence. Et Patrick Sébastien à la Télé, le soir.

    Les samedi soir de juin, on se fait un petit barbecue discret/discret, si le vent vient du bon côté...

    Les toutous, des gros pour la plupart, des " Je monte-la-garde ", ça aboie fort, aux " Alouettes "... surtout lorsqu'un cycliste inconnu s'égare dans le lotissement.

    Dimanche matin... Un gros dodo jusqu'à 10 plombes et plus. Le tiercé, le repas dominical, la sieste, la promenade en bagnole quand il fait beau jusqu'à la petite forêt apprivoisée à 3 kilomètres au delà de la sortie de l'autoroute, ou, quand il pleut, une virée au centre commercial ouvert le dimanche pour voir les beaux canapés, les cuisines intégrées...

    Dimanche soir à la télé... Il hésite entre "le diable s'habille en Prada" sur la Une, ou " Les enquêtes de Murdoch" sur la Trois...

    Depuis 2 ans qu'il a bâti...bââti-bââti, aux " Alouettes ", il a pas encore fait son crépi. Il est encore tout de briques vêtu et, financièrement, nu comme un ver... Parce que la Mégane en plus des traites de la baraque, il faut la payer... Et l'un dans l'autre, les deux prêts, celui de la baraque et celui de la bagnole, ça fait plus de la moitié de la paye... Largement plus.

    A chaque fin de mois, il est raide comme un passe-lacet et doit des sous partout...

    Il bâtit, bâtit bâtit...

    Bâtit sa vie... de tic et de toc, avec des projets qui ne vont pas plus au Sud que la rive Nord de la Méditérranée, pas plus à l' Ouest que la côte Atlantique ; des projets, des évasions, des étés, des campings et des bungalows, tous reliés par des kilomètres d'asphalte...

    Et tous ces arrêts devant les distributeurs automatiques de billets.

    Il bâtit, bâtit bâtit...

    Bâtit son nid...

    De tout ce qu'il peut y couver dedans jusqu' aux coquilles crevées de ses aspirations...

    Quand il se connecte sur le blog de sa jolie voisine, il assiste à un défilé de mode quatre saisons qui le ravit et il se régale des expressions du visage de la jeune femme, écoute ou lit ce qu'elle raconte, explore tout ce qu'elle a blogué et facedeboucqué...

    Il bâtit, bâtit bâtit...

    De tic et de toc, de tout ce qui est préfabriqué, standardisé, normalisé, planifié, règlementé, aseptisé...

    À quoi peut bien servir une cuisine intégrée lorsque, du lundi au vendredi, on ne bouffe que des denrées en barquette, en plastique ou en boîte ; le samedi soir, la pizza du camion de passage ; et le dimanche, si l'on cocufie sa salle à manger-salon pour le menu gastronomique de l'hôtel des Acacias, au beau milieu de tous ces Messieur-Dame en costume, tailleur, coiffure en chou-fleur, moustaches à la Jacques Lanzman et pochettes de cuir à bandoulière ?

    Il a bâti, bâti-bâti...

    Mais dans sa maison, y' a pas de bibliothèque. Il ne lit pas de bouquins. C'est pas un intellectuel.

    Chez son voisin, y' a une très grande bibliothèque, en autre chose que du toc, du beau bois, des étagères solides qui supportent de gros volumes reliés de cuir. Mais le voisin qui ne lit pas davantage que lui, achète cependant vingt-cinq euros en moyenne, tous les grands succès, tous les grands prix littéraires, tous les ouvrages à la mode que pondent les auteurs connus, les hommes politiques, les journalistes et les écrivains de renom...

    Pour les derniers romans de la saison il est abonné à France Loisirs. S'il ne lit pas, alors pourquoi les achète-t-il, tous ces bouquins ? Tout de même, il les "survole" un peu, à temps perdu (les plus "calés") pour avoir l'air de s'y connaître...

    Chez le " Tabac-journaux " du coin, les rayons du milieu du magasin regorgent de tout ce qui peut sortir, se vendre, à grand renfort de bandes publicitaires, rouges le plus souvent, autour des livres, avec la sacro-sainte mention " prix renaudot, fémina, interallié ", etc...

    Les bouquins, c'est comme la bouffe, la mode, les programmes télé, les séries américaines et les derniers films qu'on voit dans toutes les grandes salles de cinéma. Ils sont aussi " aseptisés ", peut-être un peu moins que la bouffe. Ils sont là pour prouver que le monde existe bel et bien, en bonne et due forme, avec quelques malheurs, certes... et un peu de contestation parce qu'il faut que ça "remue les tripes" de temps en temps. Les " pas aseptisés ", ils sont trop dangereux : ceux-là, on les trouve pas dans les bibliothèques des municipalités de Gauche et encore moins de Droite, ni dans les librairies, ni chez le " Tabac-Journaux " du coin.

    Il a donc bâti, bâti bâti, notre mec de trente balais...

    Et les balais s'empilent, s'agglutinent comme des allumettes à chaque gâteau d'anniversaire.

    Il vient un temps où les balais commencent à se déplumer. Et les traites sont toujours là, fidèles au rendez-vous de la fin du mois !

    Si l'on peut, on fera plus cossu que la Mégane l'an prochain, car le dos, sur des centaines de kilomètres, passé la quarantaine, dans une caisse qui secoue, il se met à gueuler parfois...

    Quand les balais passent, les habitudes changent...

    À la place du pantalon à doubles poches latérales, on arbore la petite pochette en cuir ou la sacoche à rabats et bandoulière. Au lieu de s'asseoir sur le canapé les genoux croisés avec son assiette de charcuterie salade composée devant la télé pour le thriller, on bouffe à table, normalement, en famille.

    Cinq ans après avoir bâti, bâti bâti... not' mecton il a traversé une p'tite crise... La crise existentielle, le pourquoi et le comment, le sens du monde, qu'est-ce qu'on fout sur Terre et tout le tremblement ! Alors, il s'est mis à avoir de la " vie intérieure ".

    Résultat, sa femme l' a plaqué, ses enfants ont tous les soirs déserté le domicile familial. C'était devenu invivable pour tout le monde.

    Il a essayé d'écrire un bouquin, not' mecton... Pas besoin d'être un intellectuel pour écrire un bouquin... Une histoire impossible, une histoire de gosses turbulents dans une cité HLM en pleine explosion socio-culturelle, avec des gonzesses hyper-drôles, des vieux qui veulent pas aller en maison de retraite, des banquiers qui se révoltent, des assureurs qui se désassurent, des facteurs qui brûlent la publicité en pleine rue, et des femmes qui ne font plus à bouffer ni la vaisselle ni la lessive ni le repassage... Le style y était... à peu près, sauf les mots qui n'existent pas dans le dictionnaire. L' atmosphère ? Oh, putain, ouais, y'en avait, de l'atmosphère... ça n'en finissait pas, trois cent pages !... Mais il y passait ses nuits, ses dimanches, ses congés, il en bouffait plus...

    À un océan de la conclusion, not' mecton, il a lâché... Il a renoncé, tout bazardé. Il a coulé, coulé coulé.

    Non, on n'écrit pas un bouquin quand on crèche aux " Alouettes ", quand on fait un boulot de " système " et qu'on n' a ni les relations, ni l'environnement pour... Pensez-vous, comment trouver le temps de composer tout d'abord en consignant les idées générales dans un carnet, puis de taper ensuite le texte, de corriger, de relire, d'arranger, de vérifier si ça tient debout... l'enchaînement, le scénario, la concordance des situations, la vraisemblance, le style, l'orthographe, la documentation, toutes ces heures et ces heures, où chaque paragraphe est un bout de terrain conquis, et ces jours et ces nuits sur des mois et des mois, faits d'instants volés à la routine ; les regards moqueurs ou indifférents des autres... Après huit heures d' activité professionnelle et de déplacements, avec toutes ces tracasseries quotidiennes, sans contacts, sans relations, sans pouvoir vraiment se confier à personne dans son enourage, sans appuis médiatiques ou autres... Autant vouloir faire sortir une forêt d'un désert, accoucher une vache du ventre d'une souris... C'est de la folie, de l'utopie, du suicide moral...

    La crise s'est tassée, finalement, au bout de quelques années. Elle a fait comme tous les ronds dans l'eau, elle s'est diluée...

    Sa femme est revenue : au Tabac Journaux du coin, on a vite fait le tour des magazines people et de mode en dépit de leur immense diversité...

    Le fiston est revenu aussi : on ne peut pas toujours crécher dans la piaule des copains...

    Il bâtit, bâtit bâtit...

    ... Ou plutôt...

    Il pâtit, pâtit pâtit...