Réflexion sur le pardon

Le pardon est la réponse la plus difficile à apporter en face de l'inacceptable, de la violence, de la cruauté, de la haine, du mépris, de l'indifférence, de l'hypocrisie, de l'injustice, de tout ce qui nous blesse, nous humilie, nous heurte, venant des personnes qui nous font du mal...

Parce que le pardon est une gageure et qu'en aucune façon il ne rend l'autre meilleur ou différent dans sa vision du monde et de la relation humaine...

Cependant le pardon a un pouvoir que la violence n'a pas, celui d'ouvrir une voie aussi étroite et incertaine soit-elle, ne serait-ce que par l'interrogation, par l'étonnement qu'il suscite... Et peut-être par la réflexion venant en corollaire de l'interrogation et de l'étonnement...

Mais réfléchir sur le pardon, envisager la possibilité du pardon, n'implique pas que l'on doive étouffer en la mouchant, la flamme vive de la parole, notamment de cette parole de soi avec ses mots et son langage nous portant à exprimer de que l'on pense « à cru et à cœur »...

 

L'une des grandes figures humaines contemporaines les plus représentatives de la philosophie du pardon, c'est Nelson Mandela... Qui, par le pardon a en effet ouvert une voie... Une voie réelle dont il a été possible de mesurer les effets, et ce que cela a impliqué dans la société de la République d'Afrique du Sud...

C'était là, une voie incertaine, aléatoire, imparfaite dans son tracé et dans son bornage, certes... Et après la disparition de Nelson Mandela, ce qui demeure de son œuvre s'est en parti délité... Mais il en subsiste la « pierre angulaire »...

Pardonner à ceux qui nous ont fait tant de mal, pardonner aux oppresseurs, aux criminels, aux voleurs, aux accapareurs... C'est prendre le risque de laisser les oppresseurs, les criminels, les voleurs (qui ne seront pas forcément les mêmes) reprendre leurs activités …

Mais le risque n'est-il pas encore plus grand, à laisser en son état fonctionner la société, le monde tel qu'il est avec ses injustices, sa violence, l'accaparement des uns au détriment des autres, les lois soit-disant édictées pour tous mais en réalité au profit des privilégiés et des dominants qui se servent des lois pour restreindre les droits et les libertés du plus grand nombre ?

Le risque n'est-il pas encore plus grand, à renverser par la violence, par la vengeance, par le contraire du pardon et donc par la condamnation, un système de société par un autre censé être « plus juste » ?

Un « choix de société » c'est aussi le choix d'un risque à prendre : dans quel monde y-a-t-il finalement plus de violence et d'injustice ? Et, en corollaire à cette question, cette autre question : « dans quel monde une voie peut-elle au mieux s'ouvrir, si aléatoire, si incertaine que soit cette voie ? »

 

La violence notamment révolutionnaire, par la force mettant à bas un pouvoir en place, par le combat et par les armes ; n'est à mon sens « justifiable » que si elle est perçue comme étant une étape nécessaire par laquelle il faut passer... Car en tant que seule fin ou seul moyen, en tant que seul et même marteau frappant sur la même enclume, sans autre vision que celle du remplacement d'un ordre par un autre ordre, non seulement elle n'est plus « justifiable » mais elle n'ouvre aucun passage, aussi loin que le regard se porte le long de la ligne d'horizon ceignant un paysage changeant de couleurs, d'ombre et de lumière au gré de l'alternance des saisons...

 

 

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