gestes

  • Vers un monde sans contact ?

    Des sourires masqués, des bises et des gestes de tendresse confisqués, des “relations” de plus en plus virtuelles, des visages que l’on peine à reconnaître, des rapports sociaux défigurés… Peut-on supporter de ne plus s’approcher les uns des autres ?

    À court terme, en l’occurrence lorsque survient pour un temps – durant quelques mois, une saison, un an au plus – une insécurité sanitaire liée à une épidémie plus grave que par exemple une grippe ou une gastro entérite ; l’on peut, oui, se sentant obligé de devoir se protéger, accepter… Le port du masque, la distanciation, des limitations de déplacement, l’absence de gestes de contact…

    Mais à long terme, durant peut-être plusieurs années, ne plus pouvoir s’approcher les uns des autres, vivre en permanence dès que l’on sort de chez soi, masqué, éviter de se voir entre amis, connaissances, ne plus se réunir en famille ou en activités associatives, tout cela cependant, pratiqué dans un environnement de “gestes barrière” et mesures limitatives, afin de “sauver” et de maintenir ce qu’il reste à sauver et à maintenir de la relation humaine… Non, à long terme ce n’est plus supportable, c’est entrer dans un monde où la vie quotidienne devient un désert avec de ci de là, des “oasis virtuels” reliés par des chemins rocailleux traversant des paysages arides, des champs parsemés de fleurs de pierre…

    Une autre forme de confinement que celle que nous avons connue entre le 17 mars et le 11 mai 2020 est en train d’être mise en place et de jour en jour davantage renforcée, qui ne sauvera pas l’économie car c’est bien là une “utopie” que de croire que “tout fonctionnera comme avant le covid en adaptant l’économie et les activités humaines en fonction de la présence durable du covid”. ( Autant vouloir “ménager la chèvre et le chou”)!

    Depuis que ce nouveau type de confinement avec masque partout, depuis que cette “covid – compatibilité” de la vie sociale, de la vie au travail, des activités humaines, s’impose et cela pour une durée dont on ne connaît pas la durée ; je ne me suis pas encore trouvé dans une situation où il faut garder le masque plus d’une heure, renonçant par exemple à me rendre dans une salle de cinéma ou de spectacle, dans un marché artisanal, à un festival, un concert, une fête locale, un vide grenier, une manifestation sportive ou autre, enfin, partout en intérieur ou en extérieur là où il y a du monde…

    Outre l’inconfort qu’il y a à porter plus d’une heure un masque, outre la question de l’identité, de la reconnaissance, de tout ce qu’un visage peut exprimer que l’on ne perçoit plus ; il y a, durant un temps trop long, cette respiration et cette haleine de soi, malsaines, encore plus difficiles à supporter que le sentiment de perte d’identité et d’expression, ou même que l’inconfort du seul contact du masque sur son visage…

    Au sujet du seul inconfort je “me fais une raison” en pensant à tout ce que des gens endurent dans des situations dramatiques, de souffrance, de privations, de dénuements, de violences subies… Je pense ainsi à des sans abri, à des personnes en fin de vie dans les hôpitaux, atteintes d’une forme grave de covid…

    Aussi, dans ce contexte d’une vie sociale qui était déjà difficile avant le covid, et qui est devenue encore plus difficile (un monde sans contact) ; les prises de position “pour ou contre” des uns ou des autres, souvent radicales, crispées, partisanes, fondées sur de la morale, du “bon sens consensuel” pour les uns , ou au contraire sur une contestation tout aussi radicale et fondée quant à elle, sur de l’individualisme forcené pour les autres ; nulle part ce que j’exprime au sujet de ce monde sans contact n’entre dans les discussions, les débats… L’on préfère ou plutôt l’on se fige sur des positions, sur des visions individualistes où chacun pense et agit selon ses intérêts, selon ce qui l’arrange, selon ce qui ne contrevient pas trop à son mode de vie…

    Un tel état d’esprit, un tel mode de vie individualiste et consumériste, des habitudes dont on ne veut rien changer à partir du moment où ce que l’on devrait changer, modifier dans nos comportements, contrevient à notre confort (confort “relatif” il faut dire, et à plus vrai dire fort différent selon les milieux sociaux en particulier des défavorisés et les exclus)… Un tel état d’esprit ne peut pas édifier dans l’avenir cette société de demain dont rêvent les utopistes, certains intellectuels de gauche ou de droite, en somme beaucoup de gens actuellement un peu partout dans le monde, de gens qui ne sont pas forcément des privilégiés, des riches, loin s’en faut!

     

  • Dans le même temps ...

    Toutes ces maladies dont on ne parle pas depuis que Corona court la steppe traverse les océans envahit les villes et les campagnes…

    Tous ces hommes en guerre depuis bientôt dix ans et ces populations éprouvées par la violence des combats et déplacées en masse dans les camps de réfugiés… Et qui ne savent plus où vivre ni comment vivre… Et qui survivent sans terre sans maison sans nourriture sans eau et dans une économie aussi informelle que précaire…

     

    Et, dans le même temps que celui de ces guerres, de ces misères, de ces souffrances, de ces maladies, de ces exils, de cette précarité, de cette insécurité, tout cela dans une vie quotidienne et permanente aussi difficile pour des millions de gens ; partout dans le monde, les discours des puissants, les slogans des manifestants… Mais aussi les paroles, les gestes et les actes des femmes et des hommes qui aiment, protègent et sauvent…