S'alzeimériser

      Être dans une situation “d'autisme double” par réaction d'une part contre tout ce qui vient du monde, des gens et du sens commun dès lors que le monde, les gens et le sens commun n'ont aucune reconnaissance de ta pensée et de ta sensibilité ; par réaction d'autre part contre tes propres valeurs, contre la récurrence de certains de tes souvenirs et une remise en cause ou une critique de ton “système de pensée”...

Autrement dit : “dans un monde où tu te sens étranger, inaccueilli et comme perdu dans les allées d'un immense marché dont les odeurs, les couleurs, les bruits, les voix, le boire et le manger, le jouer et le façonner, le voir et l'entendre, le faire et ne pas faire, le rire et le pleurer, le jouir et le souffrir, le penser et l'agir... ne te sont plus qu'hiéroglyphes ou signes ou symboles ou lettre morte, ou encore te blessent ou t'agressent... dans ce monde là oui, tu te sens devenir un intrus, une sorte de vieillard ou d'enfant retranché dans des rêves qui se métamorphosent en pensée et parfois en images écrites...

Mais il y a aussi ce “monde intérieur” qui est fait de tout le vécu jusqu'alors, avec la pesanteur de certains souvenirs, tout ce qui a été pensé, revu et corrigé, imaginé et rêvé, exprimé ou inexprimé, tout ce qui a été ressenti, “porté aux nues” ou vilipendé, oublié ou indifféré... Ce “monde intérieur” dans lequel tu te sens devenir aussi un intrus, une sorte de vieillard qui ne veut plus ou ne peut plus se souvenir de ses rêves, une sorte d'enfant qui ne veut plus ou ne peut plus jouer avec ses rêves...

Merci à ces êtres, amis ou proches, ou même inconnus et jamais rencontrés, à tous ces êtres d'une seule fois dans la vie en un si bref instant, à tous ces êtres dont je sais l'existence et dont les mots qui ne blessent pas me parviennent par delà les terres, les océans et les ondes hertziennes... à ces êtres dont le visage, le regard, les paroles ou les mots écrits... M'ont “désalzeimérisé”...

Et merde, mille fois merde, à tous ces autres visages qui eux, “m'alzeimérisent” chaque jour un peu plus... à ces visages d'inconnus ou de “hememènes” aux yeux desquels je ressemble à une sorte de vieillard impotent ou de gosse mal mouché dont l'existence est pour eux une gêne, une défécation d'un ailleurs incongru, un “caca nerveux”. Selon ces visages là, j'ai “la peau dure” et ne crève pas assez vite, et lorsque mes yeux seront à jamais fermés - “le pauvre, c'est mieux pour lui, il ne souffrira plus”- que m'importe ce que deviendront mes carnets et mes petits trésors, que m'importe le destin de mes écrits diffusés... Dans leur “paradis”, le paradis des “hememènes”, des “fous de Dieu”, des “élus” et des “bien vus”, des “ah il était ceci il était cela”... Il y a tout comme en dehors des villes et des villages... des déchetteries où ils “fourguent” tout ce qui ne leur plaît pas, tout ce qui les encombre, tout ce qui leur est indésirable...

Leur “paradis”? Même “convié de mon vivant” à y entrer, je n'en veux pas!

 

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