Le démon de minuit

Demon minuit bazin

... Dans ce roman -mais à mon avis c'est plus un récit qu'un roman- Hervé Bazin aborde un sujet grave et difficile, celui de cet âge de la vie où, homme ou femme l'on atteint les 70 ans et au delà...

 

Cet âge où l'on est à la merci -quoiqu'à 50 ou à 40 voire plus tôt cela arrive aussi- de quelque "accident cardio vasculaire" pouvant survenir et ainsi "changer la vie au quotidien" jusqu'à la fin de ses jours... Sans compter les autres affections du genre cancer, diabète et diverses "vacheries" lourdement handicapantes...

 

Septuagénaire, homme ou femme, à une époque, celle de ces années du premier quart du 21 ème siècle, où l'espérance de vie continue d'augmenter (mais soit dit en passant, qu'en sera-t-il après 2050 vu ce que l'on observe déjà, une diminution, aux Etats Unis d'Amérique et en Russie)... Où 70 ans d'aujourd'hui correspond à peu près à 50/55 il y a un demi siècle et à plus forte raison au 19 ème siècle, le "démon de minuit" est un phénomène de société, d'autant plus que par ce terme de "démon de minuit" l'on pense à la sexualité, à la virilité pour les hommes, à la capacité d' "atteindre le septième ciel", au pouvoir de séduction (autant pour l'homme que pour la femme ayant passé l'âge de 60 ans)...

 

L'on parle d'égalité de l'homme et de la femme... Mais -et c'est encore là, au sujet de la sexualité et du fait de "refaire sa vie" avec quelqu'un d'autre- aussi, un fait de société... Il n'est pas "si bien vu" du moins " pas vu de la même manière" qu'une femme de plus de soixante ans se "remette en vie de couple avec un homme de vingt ans plus jeune qu'elle, ou comme on dit "ait une aventure" avec un homme beaucoup plus jeune... En quoi et au nom de quoi serait-ce moins bien vu et plus "sujet à critique" qu'un homme de 70 ans vivant en couple ou se remariant avec une jeune femme de 30, 40 ans voire de 25 ans ? Si la société a évolué -on ne peut le nier- vers une égalité totale/vraiment totale entre l'homme et la femme, il y a encore des progrès à faire ! (les préjugés, les jugements, les parti-pris, la tradition, la religion, les principes moraux, tout cela n'est pas prêt à disparaître)...

 

Gérard Laguenière, le personnage central du livre, à 70 ans, refuse les tabous, les usures, les humiliations de l'âge, de la vieillesse. Il entend mourir debout et heureux si possible. Bafoué, trompé à maintes reprises par sa deuxième femme Solange, il finit à force "d'avaler des couleuvres" par divorcer et se remarier avec Yveline, une jeune femme de 33 ans avec laquelle il a un enfant Noël... Yveline était une amie de longue date avant que Gérard n'envisage avec elle une relation plus intime...

 

Hervé Bazin dans "Le démon de minuit", traite à l'acide, en force, en noirceur, et avec un réalisme "pur et dur", mais aussi en des pages sombrement comiques, ce sujet grave et difficile, à sa manière, qui est celui de cet "âge venant" qui n'est pas encore la vieillesse, la "grande vieillesse"... Mais il le traite dans un style "baroque" à souhait, avec force métaphores, effets de style, phrases parfois longues et façonnées telles ces gargouilles drôles et surréalistes, démoniaques, tarabiscotées, que l'on peut apercevoir sur les cathédrales... Ce qui ralentit la lecture si l'on veut prendre la mesure de certains passages du texte, ou même par moments rend la lecture difficile...

 

... Quelques extraits :

 

"Mais l'ondée se déclenche et, comme s'il se souvenait d'avoir été sous-lieutenant, M. Séverin qui rentre tous les soirs à Paris porte la main à sa tempe et se hâte vers sa voiture. Yveline,machinalement,ouvre son parapluie. Les pieds serrés, les bras repliés, elle se rétrécit sous le dôme de soie verte qui crépite et dont chaque bout de baleine devient une mini-gargouille."

 

"Il se tourna vers cette carte postale mouvante qu'est une vitre de wagon. N'aimant guère l'auto, encore moins l'avion qui, s'il fait beau, vole sur une carte d'état-major et, s'il pleut, sur une océan de coton hydrophile, d'ordinaire il appréciait le train, proprement nourri de volts par les caténaires : le train, procession rapide, fête-lieu, lissant du fer entre ces temples de l'exactitude que sont les gares."

 

"Une mouche posée sur un étron et suçant la chose avec ardeur connaît la félicité et des basses oeuvres de ses fesses Solange tirait d'aussi fleurantes gloires.Jusqu'où pouvait aller la rage de triompher de la ménopause dont ceci devenait une complication infectieuse méritant les imprécations dédiées à Lynote.../..."

 

 

 

 

Hervé Bazin

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