horizon

  • La buse juchée sur un poteau de clôture

    … L’Homme (l’Humain) ou plutôt ce qui s’en apparentait, de l’Homme, il y a 2 millions d’années, quand il est devenu « Erectus », et que sa station désormais debout, dressé sur ses jambes et son regard se portant sur une distance plus grande que celle qu’il embrassait du regard avant qu’il ne devienne Erectus… Nomade qu’il était en son « berceau géographique » celui de l’Afrique de l’Est, entre les actuelles Ethiopie et Tanzanie, Mozambique… Chasseur cueilleur et parcourant l’équivalent d’un certain nombre de nos kilomètres dans la journée, puis s’installant un temps en telle ou telle contrée…

     

    Mû par un instinct et sans doute dans une nécessité qu’il sentait en lui, un mouvement naturel en somme, a dès lors porté son regard vers l’horizon, cette ligne entourant le paysage dans le lointain…

     

    Il ne savait pas, Homo Erectus, qu’au niveau de la mer – ou au niveau de la surface plane du sol sous ses pieds, tout dressé qu’il était sur ses jambes, devant mesurer – peut-être – environ 1m 50 ou un peu plus, de la hauteur de ses yeux, cette ligne de l’horizon se trouvait à 7 de nos kilomètres, de lui, de l’endroit où il se trouvait… Ni, que, depuis un lieu situé en montagne, à environ 2000 mètres d’altitude, un mont, une crête, un sommet… La même ligne d’horizon alors, se trouvait à 120 kilomètres de lui…

     

    Mais il savait déjà que, plus il regardait au loin d’un endroit situé en altitude, et plus il voyait autour de lui, se dérouler un plus vaste paysage…

    Et, par instinct, par mouvement naturel – il ne pouvait en être autrement du fait de la nature même non seulement de l’homme mais de tout ce qui vit sur cette planète – son observation attentive et interrogative, se manifestait lorsqu’il regardait la ligne d’horizon, ce qui le portait à s’y avancer afin de l’atteindre, pour connaître ce qu’il y avait au-delà…

    Il y avait effectivement un au-delà, mais dès l’arrivée dans cet au-delà, il y avait encore et encore, une ligne d’horizon dans le lointain…

     

    Ainsi la ligne de l’horizon, l’au delà… L’ailleurs, l’autrement que ce qui est aperçu dans le moment…

    Mais aussi dans le paysage embrassé par le regard, tout ce qui se trouve dans le paysage ; un être vivant, autre humain ou un animal des herbes, des plantes, des fleurs, des arbres, un rocher, une colline, un cours d’eau… Tout cela observé du regard, ou perçu par les sens (l’ouie, le toucher, l’odorat)… Et suscitant de l’intérêt, interpellant, interrogeant…

     

    En 2021 tout comme en 1906 ou en 1664… Une vache dans un pré, qui, te voyant passer tourne sa tête et son regard de ton côté ; un chat devant la porte d’entrée de la maison de ses maîtres, qui te voyant marcher au bord de la route, te suit de son regard… Ou toi quand tu vois une buse juchée sur un poteau de clôture et que, fasciné, intéressé, tu la regardes un moment…

    Tout ça, ça vient de très loin, c’est vieux de centaines de milliers d’années, de millions d’années…

    Quoique… Pour la buse juchée sur le poteau, l’humain qui la scrute de son regard – s’il l’a aperçue - « il court pas les rues » ! … En 2021…

     

     

  • La conscience de l'existence de l'autre

    .. La conscience réelle de l'existence de l'autre, de ce dont cet autre est constitué, pouvant être comparé à l'arbre fait de son ’écorce recouvrant le tronc et de son bois sous l'écorce jusqu'en son cœur ... N'est pas innée en nous, ne l’est jamais, innée en nous, à vrai dire...

    Il est plus difficile de l'acquérir, cette conscience réelle de l'existence de l'autre, que de réussir ou de construire sa vie.

    Mais la conscience de l'existence de l'autre, ne rend pas forcément meilleure, plus profonde, plus durable, la relation à l'autre...

    Elle est comme un point lumineux que notre regard parvient à percevoir, sur une ligne d'horizon parcourue de cimes de différentes formes, et de brumes de diverses nuances de blanc, de gris, de bleuté, parfois de quelques incandescences au moment où le soleil se lève ou se couche...

    Le point lumineux, perçu, révèle – peut-être – l'existence d'un passage, le passage par lequel s'ouvre, ce "monde de l'autre" qui, habituellement et surtout par individualisme et par une conscience surdimensionnée, aiguë de soi, nous est étranger...

     

     

  • La ligne d'horizon au delà de laquelle se porte l'imagination...

    Aucun humain vivant aujourd'hui, du bébé venant de naître au vieillard le plus âgé, ni d'ailleurs les bébés qui vont naître d'ici 2050, aucun humain vivant aujourd'hui ou en 2050, ne verra le monde tel qu'il sera devenu, tel qu'il aura évolué avec ses technologies, ce qui aura été inventé, ses modes de vie, sa civilisation, ses sociétés, ses pays et ses peuples… Au 23 ème siècle…

    Pas plus qu'aucun humain ayant vécu au début du 19 ème siècle, par exemple en France au temps de Napoléon en 1810, ne pouvait voir ou imaginer ce que le monde serait en 2019…

    En dépit de ma capacité à imaginer le monde en 2050, et, dirais-je, de cette prescience qui est la mienne, de ce que sera déjà le monde en 2050 (né en 1948 j'aurai 100 ans en 2048), et à plus forte raison, de ce que sera devenu le monde au 23 ème siècle ; je prends conscience du fait que ma capacité d'imaginer et de pressentir, ne peut être comparable qu'à une ligne d'horizon dont je n'aperçois que ce que je crois être des cimes d'arbres ou des forêts ou des toitures d'habitations au travers d'une brume enluminée de rayonnement solaire…

    Et qu'aussi loin que je puisse avancer je ne verrai que cette ligne d'horizon au-delà de laquelle mon imagination se portera sans que jamais ce qui est au-delà de l'horizon se révélera à mon regard…

    C'est la raison pour laquelle la mort est pour moi comme une porte qui se ferme brutalement et pour toujours, une porte qui m'interdit en quelque sorte, d'accéder à ce que je veux voir, continuer à voir et à en être le témoin…

    Comment ça va se goupiller l'affaire là?“ … La seule chose que je sais, en toute certitude, c'est qu'il y aura toujours des témoins… Autant qu'il demeurera encore possible de témoigner, de raconter, d'écrire, de transmettre tout ce qui aura été vu tel que cela aura été (et non pas tel qu'on aura voulu que ce soit vu)…

    Le témoin de ce qui demain sera est en somme, le prolongement du témoin que l'on a été… Ainsi la porte ne se ferme-t-elle non pas à clef mais avec seulement la poignée, une poignée qu'il suffit de tourner pour entrer dans la pièce où le témoin qui ne témoigne plus n'a pu entrer…