Georges Simenon

  • Le petit saint, de Georges Simenon

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           Presses de la Cité, édition de 2005 en livre de poche.

    Roman achevé à Épalinges, le 13 octobre 1964. Première édition janvier 1965.

          Bien qu'ayant lu la quasi totalité de l'oeuvre de Georges Simenon, dont bien sûr les Maigret... Je viens récemment de découvrir ce roman "Le petit saint", qui est à mon avis, et de loin dirais-je, l'un des meilleurs de Georges Simenon...

    Il faut dire que Georges Simenon n'a pas écrit QUE des romans policiers, mais aussi des romans "sociologiques", comportant des études réalistes et détaillées  de personnages évoluant dans des situations difficiles ou dramatiques...

    Le petit saint, résumé :

        Louis Cuchas est l'avant dernier d'une famille de six enfants. Nés de pères différents, rien ne les rapproche ces enfants, sinon le logement exigü dans lequel ils dorment et vivent, dans une promiscuité où le vice lui-même n'a plus de nom. Leur mère, Gabrielle, partagée entre ses amants successifs et sa charrette de marchande des quatre saisons, n'a guère le temps de s'occuper de ses enfants.

    C'est parmi les petites gens du quartier populeux de la rue Mouffetard, que Louis laisse le monde venir à lui, enregistrant sons, couleurs, images, sensations, sous la protection de sa mère dont il est le préféré.

    À l'école il s'isole et son regard pétillant excelle à saisir les choses comme les gens. Le surnom de "petit saint" que lui donnent ses camarades d'école, a rapidement gagné les Halles où, à sa demande, il accompagne sa mère chaque matin avant l'aube.

    Ses frères et soeurs vont déserter l'un après l'autre le logement familial, Gabrielle ne reçoit plus d'hommes, Louis grandit...

    Il a quitté l'école et travaille la nuit aux Halles, mais il reste toujours le petit garçon aimable et pudique avec son visage de fillette encadré de boucles délicates.

    Un jour il se découvre une grande passion, la peinture. Désormais il ne vivra que pour la peinture, s'efforçant de traduire à sa manière dans la juxtaposition de couleurs pures, ce qu'il a accumulé depuis vingt ans.

    C'est l'éclosion à une vie nouvelle qui le fascine, malgré les jours difficiles, et, en même temps, la première expérience amoureuse.

    Il déménage, quittant la rue de son enfance et sa mère qu'il aimera toujours tendrement.

    Ses toiles se vendent, sa popularité naît et croît, grâce à son ami, Suard, qui a encouragé ses débuts. Mais, peu soucieux d'argent et de gloire, il restera Louis, le mystérieux petit garçon à la fois si proche et si lointain, dont la renommée, auréolée de légende, fera plus tard un artiste célèbre.

    Extraits :

    ... Avait-il dormi? Son corps était chaud sous la couverture. Aucun bruit particulier ne l'avait éveillé en sursaut. Il avait seulement entendu, derrière le rideau, qui n'était qu'un vieux drap de lit suspendu à une tringle, un halètement familier, entrecoupé de gémissements, avec parfois le grincement des ressorts du lit. C'était sa mère qui couchait dans ce lit, presque toujours avec quelqu'un. Puis, du même côté que lui du drap tenant lieu de cloison, il y avait Vladimir, ensuite Alice, ensuite les jumeaux, lui-même, chacun sur sa paillasse, et, contre le mur, le bébé dans son lit-cage.

    ... Il avait vaguement écouté le halètement, puis, petit à petit, il avait distingué la silhouette de Vladimir, en chemise, les genoux sur la paillasse, qui regardait par le trou du drap de lit.

    Louis n'était pas surpris ni curieux. Tout cela lui était familier, comme s'il l'eût vécu souvent à son insu. Pour la première fois, seulement, les images, les sons, se rassemblaient, formaient un tout qui avait un sens.

    Mon avis :

    Si l'oeuvre de Georges Simenon me paraît remarquable et surtout intéressante dans son ensemble,  je crois bien que "Le petit saint" en particulier, demeurera de tous les livres de Georges Simenon, celui qui m'aura le plus marqué... Peut-être parce que, dans une certaine mesure, je me suis senti par certains côtés, assez proche du personnage de Louis...

    J'ai toujours pensé, en tant qu' "homme d'écriture et de poésie" (si je puis dire)... Que la peinture, que le dessin, ou encore que le modelage, cela pouvait être "un peu comme l'écriture" et, qu'en quelque sorte, l'on pouvait aussi "peindre des tableaux" avec des mots, des tableaux de personnages, de situations, avec une "atmosphère", une sorte de paysage animé... Le tout, avec "un sens évident" ou un sens "suggéré" ou encore, "un sens caché"parfois...