Démesure dans la déraison

 

     L'on voudrait tout faire selon les possibilités actuelles de la technologie, des applications et des expériences en matière scientifique, selon les progrès réalisés, selon les toutes dernières innovations qui déterminent nos modes de vie...

L'on voudrait jouir de tout, se rendre en quelques heures à l'autre bout de la planète par avion, habiter une maison là où l'eau d'une rivière ou de la mer ne peut plus venir parceque l'on a édifié de puissantes et hautes digues ; l'on voudrait que tout soit sûr, le plus sûr possible, le plus fiable, qu'il n'y ait pas le moindre empêchement, que l'on puisse être remboursé en cas de “pépin”, n'importe quel “pépin”...

L'on veut un monde totalement sécurisé, aseptisé, médicalisé, “assurisé” contre tous les aléas et désaléas possibles et imaginables... Parce qu'il faut à tout prix que le “dada” puisse continuer de trémousser nos fesses, que l'eau du robinet puisse couler claire et potable, que les trains roulent, que les marchandises venues de toute la planète par bateau, avion cargo ou camion, arrivent à bon terme dans les grands entrepôts puis dans nos magazins et même directement à notre domicile... Parce qu'il faut à tout prix que l'argent rentre dans les caisses et fasse bondir la Bourse et grossir les dividendes d'actions... Parce que l'on ne peut attendre ni demain ni encore moins après demain, parce que si ça arrive pas, c'est un autre qui fera arriver... Ou l'on ira voir ailleurs (ou on “fera ballon” dans le pire des cas)... Alors il faut des garanties, toujours plus et de meilleures garanties, et l'on s'assure, se réassure, s'ultrassure...

Oui, l'on voudrait tout faire, tout pouvoir, tout concevoir, rendre l'impossible possible... Et ne rien risquer! Absolument rien risquer!

C'est ça, la déraison, l'absurdité, la démesure de la déraison !

Alors... Un “gros pépin”? Ah, putain, “ils l'ont dan'l baba, les gros culs”? Ceux qui ont misé, prêté, engagé, fourni (parcequ'ils avaient “les reins solides, les reins renforcés de tous nos éreintements”)... “Ils l'ont dan'lbaba”dira-t-on, chantera-t-on en choeur tous ensemble, tous les pauvres bougres de la Terre ? Oui, c'est vrai, dans un très/très gros pépin, ils l'ont effectivement dan'l'baba!... Mais le gouffre financier, le pognon perdu, les affaires en déconfiture, les avions cloués au sol, les camions et les trains qui roulent plus, la dette devenue insupportable et surtout irremboursable... Pour tout ça, oui pour tout ça... Y'a encore des milliards de poches à faire car le calcul est très simple : deux/trois p'tits sous pris chaque jour dans chaque poche multiplié par six milliards et demi, ça fait un sacré pactole!... D'autant plus que ces deux/trois p'tits sous chaque jour (en moyenne) pris dans la poche de chaque homme ou femme de ce monde, et partout dans ce monde... On les trouve toujours! Et quand il y en a qui n'ont vraiment rien, rien de rien, y'en a plein qui en ont un peu, tant soit peu...

 

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