propos

  • Débats difficiles, propos lapidaires et brutaux

    … Une provocation de trop, de la part de Michel Houellebecq, auteur il faut dire « très décrié » dans les milieux littéraires, non seulement pour ses propos sur l’Islam (dans un entretien lors d’une interview au magazine Lire en 2001 après parution de l’un de ses romans « Plateforme ») mais aussi pour son « absence de style » aux yeux de ses détracteurs qui lui reprochent son recours fréquent à un langage quotidien du genre « je bande, il pleut » et à d’autres formulations éculées, ainsi qu’à des clichés…

     

    Certains critiques le louent « plus grand écrivain contemporain, et d’autres au contraire, disent de lui qu’il est « une nullité littéraire »…

     

    Quoiqu’il en soit pour ma part j’ai lu tous ses romans (mais pas en réalité toute son œuvre) et je ne puis me prononcer parce que je partage autant les critiques négatives de ses détracteurs que les louanges de ses « fans »… (Mais pour « apprécier » ou pour « louer » il faut sans doute à mon sens oublier les « je bande, il pleut et formulations éculées et clichés » - à moins de replacer ces formules langagières assez plates et ces clichés dans le contexte pouvant être délibérément caricatural et provocateur, de ses romans)…

     

    … Publiée en novembre 2022 dans la revue politique « Front Populaire » de Michel Onfray, la provocation de trop, de Michel Houellebecq, débute ainsi : « Le souhait de la population française de souche... »

     

    … Dans un débat public, et cela d’autant plus que le débat a lieu sur un plateau de télévision lors d’une émission en direct, d’une interview… Ainsi que dans toute production écrite (article dans un journal, dans une revue, dans un magazine, dans un livre publié, dans un blog, dans des réseaux sociaux) ; un auteur, un écrivain, un journaliste, mais aussi chacun de nous « commun des mortels » que nous sommes et nous exprimant publiquement… Lorsqu’il est fait part de ce que pense cet auteur, cet écrivain, ce journaliste mais aussi de ce que, chacun de nous l’on pense au fond de soi-même, de la vision d’une réalité nous venant de ce que l’ observe autour de soi (et de son expérience vécue)… Aussi « en partie vrai » que cela soit ; tout propos lapidaire et brutal, forcément inacceptable par la partie visée et, au-delà de la partie visée, par une majorité de gens dans une société communiquante… Ne peut qu’être « contre productif » puisque ce qui est « en partie vrai » se trouve alors, dans l’émotion du moment, occulté…

     

    Sur le plan de la morale et de l’éthique, des propos lapidaires et brutaux lors d’un débat ou dans une production publique, sont inacceptables, scandaleux, enfin tout ce que l’on est en droit de juger, de condamner, de dénoncer, de combattre…

     

    Mais au-delà de la question de la morale et de l’éthique il y a la question du « sens résultant » de ce qui est exprimé en tels ou tels mots, phrases… (Dans un propos lapidaire, brutal, d’une extrême violence, c’est l’émotion qui éclipse quasi totalement la réflexion, et de ce fait, ce qu’il peut « y avoir de vrai » dans ce qui est dit ou écrit, se trouve forcément occulté par les parties commentant le propos et jugeant scandaleux ce propos…

     

    Encore faut-il « faire la différence » entre caricature, humour noir décapant iconoclaste, dans une production écrite, dans un dessin, une image arrangée ( pouvant choquer, être jugé scandaleux) et un propos, des mots, des phrases, ce qui est dit ou écrit et n’étant pas caricatural, donc l’expression d’une pensée, d’un sentiment, lapidairement et brutalement….

     

    Dans un débat où le thème du débat porte sur la religion ou sur une religion en particulier, ainsi que lorsque le propos porte sur la religion ou une religion en particulier, l’on peut tout de même affirmer que par exemple, le catholiscisme exerçait son emprise dans la société française (et Européenne et en Amérique) au 19ème siècle et jusqu’encore le milieu du 20ème en France et en Europe… Et que l’Islam exerce de nos jours son emprise dans la société française notamment dans les lieux, quartiers, villes où l’Islam est implanté, devenant en ces lieux, la religion dominante…

     

    L’emprise exercée par une religion dans une société, ce qu’ implique cette emprise dans la vie quotidienne des gens en contraintes, interdictions et prescriptions… Est-elle acceptable ? N’appelle-t-elle pas à résister à la domination exercée ?

     

    La religion, toutes les religions monothéistes notamment, proposent et imposent un modèle, une explication du monde, de la vie… Or un modèle est toujours une simplification, devenant ainsi un repère tangible, accessible à tous, qui « entre dans les mœurs » (pour ainsi dire dans les gènes)… Et tout ce qui contrevient au modèle, ou s’oppose ou se différencie trop du modèle, dérange, est condamné par l’autorité religieuse, et par la société lorsque cette société subit l’emprise de l’autorité religieuse…

    La religion, les religions, c’est l’obscurantisme.

     

    Mais… Reste le langage, reste la formulation, reste l’argumentation, tout ce qui peut être exprimé par des mots, par des images, par la caricature, et qui se rapporte à des faits, à des situations, à des comportements, dans la communication orale ou écrite, une communication excluant la brutalité et le raccourci lapidaire…

    Pour la caricature cependant, ne peut être exclu que la vulgarité ou que la grossièreté associée à une absence de facture de ce qui est produit et montré (la facture étant en quelque sorte le talent ou l’habileté dans la réalisation)…

    Et si par la caricature, la plus scandaleuse, la plus iconoclaste, la plus dérangeante – en propos comme en dessin – l’inacceptable pouvait en quelque sorte être « exorcisé » ? Faisant si mal à voir ou à entendre que l’inacceptable ne puisse se produire réellement ? Sachant – ne l’oublions pas – que la caricature produite peut au contraire inciter des gens à commettre ?

     

     

  • La parole

    … La parole tranchante mais honnête n’ouvre pas le même espace de relation que la parole édulcorée mais aussi consensuelle qu’hypocrite…

    La parole tranchante et honnête surprend, dérange et ne fait pas l’unanimité autour d’elle, et ouvre donc lorsqu’elle est entendue, un espace de relation d’autant plus limité que la parole se fait plus tranchante, plus libérée de tout ce qui peut la conditionner et donc plus insoumise à ce qu’il convient au plus grand nombre d’être écouté et suivi…

    La parole édulcorée ouvre toujours un plus vaste espace de relation d’autant plus grand qu’elle « s’habille » ou se « maquille » en conformité avec ce qui convient au plus grand nombre…

    L’exemple le plus « emblématique » de l’espace de relation qui s’ouvre (ou ne s’ouvre pas) dans le monde d’aujourd’hui, c’est celui qui dépend en grande partie des nouvelles technologies de la communication – notamment avec internet et les réseaux sociaux… Le critère fondamental de référence étant, sur les réseaux sociaux les plus suivis, le nombre de vues d’une publication en général ne dépassant guère 10 lignes et accompagnée d’image avec ou sans mouvement…

    Il est évident – plus qu’évident à vrai dire – que la parole tranchante et honnête qui dérange, surprend, indispose ; qui est méprisée, déconsidérée, « zappée »… N’aura jamais un nombre de vues très significatif sur Twitter ou sur Facebook ou sur un blog…

    Et… (ça il faut le dire aussi)… « Si elle devait, cette parole, oui (on sait jamais), avoir du jour au lendemain, un très grand nombre de vues…

    Alors ce serait :

    Soit un « effet de mode »

    Soit une révolution

    … L’« effet de mode » étant de loin le plus probable – et n’étant jamais au grand jamais le moteur d’une révolution…

     

     

  • La construction du propos

    S’il y a dans ce que l’on exprime, du témoignage et de l’enseignement, la meilleure construction possible du propos, la plus proche de la vérité et si l’on peut dire, la plus humaine… C’est celle qui part de l’apparence des choses, des événements, des faits que l’on évoque ; de l’émotion, de la première impression, de ce qui est ressenti, de ce qui correspond à ce à quoi l’on est sensible en fonction de sa vision personnelle et de la culture que l’on s’est faite par ce qui nous vient des autres et de soi – tout cela en effet ne peut être nié car c’est le “côté humain de l’affaire” – mais qui ensuite dans le propos, se nuance, se fait réflexion, et entre dans ce qui se situe au delà de l’apparence, au delà de l’émotion, au delà de la première impression, au delà de ce que semble vouloir dire les faits, les événements, les situations par eux mêmes…

    Et aussi, au delà même de ce que nous avons acquis en connaissance, en transmission de savoirs par les autres, au delà de ce dont nous nous sommes faits nous mêmes… Et qui est en quelque sorte, comme une pièce déjà bien meublée dont la porte de communication avec une autre pièce nous invite à la passer pour sans doute de l’autre côté, trouver ce qui dans la pièce déjà meublée, fait peut-être encore défaut…

    Même sans témoignage et ou enseignement particulier, dans ce que l’on exprime, c’est encore cette construction qui part de l’apparence et de l’émotion, parfois du jugement que l’on est enclin à porter, et qui ensuite se fait réflexion ; qui est, à mon sens, la meilleure possible…

     

  • La force mais aussi et hélas, l'impuissance du monde

    ... L'intervention d'Emmanuel Macron, par son introduction, par les annonces qui ont été faites, par tout ce que contenait cette intervention du début jusqu'à la fin, et la conférence de presse avec les questions et sujets évoqués, des journalistes ; m'inspire la réflexion suivante :

     

    Il y a bien, incontestablement, dans le discours, dans le propos, dans la manière de formuler, dans l'émotion, dans la "vérité" même -si l'on veut- pour ne pas dire "dans une sincérité manifeste"... Et aussi dans un "cadre de réflexion"... Il y a bien, oui, dans le discours d'Emmanuel Macron -comme d'ailleurs de la part de ses prédécesseurs, de François Hollande jusqu'à Charles De Gaulle... "Quelque chose qui sonne bien et fort" -peut-on dire... Et qui suscite autant d'émotion (par les mots utilisés, le langage, le ton, le regard, les gestes) que de réflexion, de prise de conscience, de volonté de "faire pour le mieux", de s'adresser à tous les citoyens tous milieux sociaux confondus...

    ... Par extension, l'on peut dire aussi que les élus de la République, sortis des urnes et constituant une majorité gouvernementale ; que les "figures emblématiques" (les plus en vue, les plus actifs, des différentes formations politiques d'opposition), pour la plupart d'entre eux, ont chacun dans leurs discours, dans leur vision, dans leur manière de formuler, "quelque chose qui sonne bien et fort" et où entre une part de sincérité... (le côté humain dans ce qu'il a de meilleur et de plus vrai en somme)...

    ... Si les idées sont bonnes, si un "certain esprit de vérité", si une incitation à la réflexion et à l'agissement, sont manifestes – ou peuvent l'être, des uns et ou des autres... La réalité du monde est en opposition, en adéquation, en contradiction, avec le monde des idées, des discours, de la bonne volonté des uns ou des autres...

    Et, dans la réalité du monde, la réalité telle qu'elle est dans sa brutalité, dans ce qu' elle a de concret, dans ce que vivent au quotidien les gens en France et partout dans le monde -en dépit de bien de progrès et d'améliorations pour des centaines de millions de gens, puisque dans l'ensemble on vit tout de même mieux (confort, aisance, santé, accès à des biens et des services, en 2019 qu'en 1492)... La réalité du monde donc, ne ressemble pas du tout à ce que portent en eux et en avant les discours et les idées, et ce qu'il peut y avoir de vraiment sincère en chacun de nous...

    Je n'évoquerai que deux choses parmi tant d'autres... L'une très précise concernant l'emploi salarié, les conditions d'exercice d'un emploi et l'âge du départ à la retraite... Et l'autre plus générale concernant la différence qu'il y a entre le revenu du travail et le revenu du capital :

    -Est-ce qu'une caissière de Leclerc qui passe huit heures par jour (ou quatre si elle est en CDD) à scanner des code-barre de produits, qui a 59 ans, a envie -vraiment envie- de travailler jusqu'à 62, 63 ou 65 ans ?

    -Pourquoi ce "silence radio", quasi général et seulement rompu par quelque coup porté sur la marmite de ci de là mais à peine audible parce que noyé dans l'orchestration du monde (ou même intentionnellement étouffé dans le mépris et la condescendance)... Ce "silence radio" sur les revenus du capital, sur les dividendes versés aux actionnaires... Ce même et assourdissant silence sur la domination des lobbies de l'industrie, de l'agro-alimentaire, de la pharmacie, des marchés de la communication, de la santé, de la biologie, de la technologie, du Web (avec Google, Apple, Amazon and Cie) ?

    - Et il y a aussi cette déliquescence du monde et de la société, cette "perte de repères", cette violence dans les propos et dans les comportements, et tout ce qui fait davantage un "individu" qu'une personne humaine...

     

    ... Il y a dans le Verbe, autant de force que d'impuissance... Mais puisqu'il y a la force, alors "que le Verbe soit", tout de même !