cimetières

  • Ah, ces cimetières ...

    … Ah, ces cimetières où tu n’as pas les tiens, que de temps à autre ici ou là, dans ce beau pays de France, tu visites, t’arrêtant devant une tombe abandonnée, de terre surmontée d’une croix en bois ou devant un « grand livre de pierre » sur lequel depuis bien des années, plus personne ne vient poser de fleurs… Imaginant ce que fut la vie de celui, de celle dont l’inscription sur la pierre s’est effacée… Que n’as tu, ta vie durant, rejoint par la pensée, par voie postale ou « webienne », ou en vélo, en bagnole, en train, à pied… Cet « ami ou amie sans guillemets »… Dont tu t’es éloigné au « profit sans profit » d’« amis avec guillemets »…

     

     

  • Les cimetières

    Dans ces cimetières qui sont ceux où j'ai les miens et les gens que j'ai connus

    Celui de là où je demeure et ceux d'ailleurs de partout où je suis passé depuis tant d'années

    M'arrêtant devant le mausolée de l'un ou la stèle de l'autre

    Qui ont subi les outrages du temps et de l'abandon

    Ou encore devant une simple butte de terre d'hier fleurie d'un tout petit bouquet

    Dans ces cimetières où les livres de pierre peuvent s'approcher les uns des autres

    Sans jamais se séparer jusqu'au jour où trop disloqués et plus jamais contemplés

    Ils sont retirés

    Où les livres de pierre racontent la vie des court-vécus et des long-vécus

    Par deux dates un nom et tout un imaginaire surgi de la pensée du visiteur que je suis

    Dans ces cimetières d'ici et d'ailleurs

    Gisent désormais depuis le printemps des poètes qui ne s'est pas fait

    Les morts de l'invisible destroyer naufrageur de vies

    Et le monde d'après que les disparus ne verront plus encore s'agiter

    Sera celui où s'approcher les uns des autres

    Ne deviendra possible que comme entre livres de pierre

    Dans les cimetières

     

    NOTE : à propos d'un tel, d'une telle, dont on voit l'année de naissance et l'année de la disparition, selon l'écart entre les deux années, je dis « Il-ou Elle court vécut... ou long vécut »... Suivi, selon l'époque traversée, de « Il-Elle a connu tel événement » ou encore « Il-Elle fut contemporain de tel personnage de la littérature »...

     

     

  • Les cimetières

          Les cimetières sont des sortes de bibliothèques dont les allées sont des étagères sur lesquelles sont disposés des livres de pierre...

    Les livres de pierre sont parfois des monuments orgueilleux et ciselés qui trônent dans le carré central, mais le plus souvent ils sont de grands lits de marbre qu'une fois l'an on fleurit de chrysanthèmes.

    Et dans la bibliothèque des livres de pierre, je cherche ces souvenirs de toi que la vie ne m'a jamais montrés, ces souvenirs de toi que je n'ai pas...

    Les apprêts mortuaires, les politesses et les regrets bienséants ont tout enseveli dans ce qui alors se dit "il, elle était ceci ; il, elle était cela..."

    Ici aussi tu es "de passage"... Car le livre de pierre orgueilleux et ciselé, ou le grand lit de marbre, ne seront plus dans ces temps lointains où l'étoile polaire d'aujourd'hui ne dira plus le Nord...

    Les pensées qui me viennent, d'étagère en étagère, à la vue de tous ces livres de pierre, ne sont pas des fleurs artificielles, et je cueille dans un jardin imaginaire ces souvenirs de toi que je n'ai pas mais que je vois fleurir...

    Je m'arrête devant cette tombe sans nom, une tombe telle qu'il en existe dans tous les cimetières, une tombe pauvre et abandonnée qui fut jadis un beau livre de pierre ; ou qui est un livre de terre avec un marque-page en croix de bois... Un livre de terre ou un ancien livre de pierre jamais fleuri de chrysanthèmes, un livre que les vivants ne lisent pas...

    Je ne sais pas ce que l'on a dit ou écrit de toi avant que tu ne dormes sous ce livre de pierre ou de terre.

    J'ai senti ressusciter une solitude, dans un rêve éveillé...

    Et dans ce rêve j'étais devenu un enfant qui courait les bras tendus vers un visage dont on n'avait pas vu la lumière avant qu'il ne s'éteigne...