Puissent ces mots ...

     Puissent ces mots que j'écris là, se poser, telles de douces lèvres de femme, sur ce qui leur fait mal, sur leurs blessures, sur leurs cicatrices encore vives, sur leurs attentes si fortes et parfois si désespérées, à tous ces visages que je connais et dont je ne cesse de me souvenir, pour les avoir une seule fois rencontés ou si souvent vus...

Puissent ces mots venus de mon âme, de ma pensée, telles de douces lèvres de femme, ôter ce qui leur fait mal, répondre à leurs attentes si fortes, guérir même de ces maux les plus graves lorsque la médecine ne fait que retarder la progression d'un mal ou mutile ; puissent ces mots ouvrir le passage vers cet espace en un point de l'horizon dont la lumière se laisse percevoir au travers d'une brume incandescente mais aussi intraversable qu'un mur de pierre...

Puissent ces mots se poser sur ces visages dont je sais si peu au fond, d'eux, de ce qu'ils sont quand on est tous chacun, toute sa vie durant tout seul dans sa peau...

Puisse s'exercer le pouvoir de mon écriture de poète qui n'est pas sortie des grandes écoles, qui n'a commencé que par des images, des rêves éveillés, et de tout ce que j'ai observé avant que je sorte de mon enfance sans pour autant la quitter...

Puisse s'exercer le pouvoir de mon écriture non pas pour monter le rocher jusqu'en haut de la montagne et le maintenir tout en haut sans que jamais il ne retombe, non pas pour que m'illuminent et me grisent les éclairages de scène ; mais pour que le mal, pour que la peine, pour que la souffrance, pour que la solitude de tous ces êtres sur lesquels mon regard s'est porté, et qui sont au fond, très nombreux, pour que le mal, la peine, la souffrance, la solitude puissent s'envoler, quitter leur peau, leur chair, leur esprit, à tous ces êtres, ne laissant plus même de cicatrice nulle part sur leur peau, ni dans leur regard ni dans leur âme...

... Toutes ces taches noires et sales que l'on parvient toujours à extraire et à porter aux regards de tous tout autour, ne parviennent pas pour autant à ôter de ma vue, ce qui, dans la page toute entière, de la première à la dernière ligne, demeure tel un paysage de tableau de peinture devant lequel on n'a pas fait que passer, ou tel un récit que l'on est parvenu à lire jusqu'entre les lignes...

... Le tableau est raté mais une part de ce qui le compose est à ce point sublime que cette part de sublime nous le fait aimer, ce tableau raté...

 

... Ces mots je les jette comme si je jetais un sort mais un sort heureux qui troue le cul à toutes les chiennes du monde. Je pense à tous ces visages qui me sont chers et que la chienne du monde visite, je pense aussi à tous ces visages qui me sont moins chers, moins chers parce que je les méconnais ou que leur regard me griffe...

 

 

ces mots

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