Ce public que l'artiste, l'écrivain ou le poète ne voit pas

... Parce qu'il n'a pas devant lui comme s'il se trouvait sur la scène d'un cinéma ou d'un théâtre, ou encore sur une place publique ou dans la rue, des spectateurs ou des visiteurs ... C'est à dire des gens en face de lui, qui le regardent, l'écoutent, et avec lesquels il pourrait s'entretenir directement, de visage à visage, de regard à regard, de voix à voix...

Il faut imaginer l'artiste, l'écrivain, le poète, devant un public qu'il ne voit pas...

Il se tient devant un espace que l'on pourrait définir comme une sorte d'écran, mais un écran "dans l'air"... Et sur cet "espace écran" n'apparaît en fait rien d'autre que de l'image, ou que du texte, tout comme sur l'écran d'un ordinateur ou d'un téléphone portable...

Disons que nous sommes là dans un avenir relativement proche de nous mais qui déjà pourrait être ... avec ce genre de nouvelle génération de mobiles et d'ordinateurs dont on pourrait se servir n'importe où et qui n'auraient plus d'écran matérialisé puisque l'image apparaîtrait comme en hologramme dans l'air ambiant...

L'artiste, l'écrivain, le poète, diffuse ce qu'il produit ; et lit, regarde, ce que produisent ses interlocuteurs en réponses ou en commentaires...

Que demeure-t-il avec les jours et les saisons qui passent au rythme des fils de discussion, de toutes ces émotions et de tous ces propos échangés, de tous ces personnages que l'on ne voit jamais autrement que sous la forme animée d'une silhouette-avatar ; et de cette écume de signes, d'images et d'écriture, bondissant en crêtes et vaguelettes sur l'immense océan en mouvement continuel ?

Que demeure-t-il de tout cela? De l'artiste et de son oeuvre devant ce public virtuel?

Une écume, aussi... Confondue dans l'immensité de l'écume de tous les lieux de l'océan...

Et au pire – ou au final – des émerveillements décolorés, une sorte de fatigue comme la fatigue des yeux et du regard lorsque le soleil a brillé trop longtemps au travers d'un ciel inventé en rêve...

En salle des fêtes, au café littéraire, dans une salle de cinéma ou de théâtre, dans la rue ou sur la place publique ; en face de vrais spectateurs formant un auditoire – et comme un réceptacle – peut-être ne demeure-t-il aussi, que de l'écume au delà des soirs heureux... Et que viennent aussi comme la vieillesse ou la dilution des jours dans le “glouglou” du trou de la baignoire, les émerveillements décolorés, la fatigue...

Mais il y a eu l'orgasme! L'orgasme à ces regards et ces visages reçus ; l'orgasme venu sur les bancs, les chaises ou les fauteuils de la salle...

Il faut imaginer l'artiste devant un public qu'il ne voit pas... Et son orgasme comme une fusée mouillée de feu d'artifice qui lui pète en plein ciel et lui fait tous les feux qu'il veut ; alors que, des autres feux du ciel au dessus de sa tête, il n'en a qu'au mieux, que l'impression -ou l'intuition- d'un fil de lumière...

 

public virtuel

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