Six millions quatre cent mille

     Je tente dans mon esprit, d'imaginer ce que peut représenter, pour autant que cela puisse être possible, une foule de six millions quatre cent mille personnes assemblée en un même lieu, en un même espace... Mais à vrai dire, quel lieu, quel espace ?

Cela n'a rien à voir avec, par exemple, un rassemblement de quelques milliers à plusieurs dizaines de milliers de gens au parc des expositions de Villepinte, au parc des expositions du Bourget, au Zénith de Paris, sur la place de la Bastille, sur la place de la Concorde...

Six millions quatre cent mille personnes, cela ne peut être imaginé autrement qu'en se représentant en esprit, autant de personnes assises devant leur poste de télévision chez elles et dans toute la France, en train de regarder par exemple en direct, l'enterrement d'un artiste ou personnage célèbre ; ou de suivre heure par heure le déroulement d'un évènement hors du commun et dramatique...

Six millions quatre cent mille personnes, cela veut dire que ton voisin, que l'une ou l'autre des personnes que tu rencontres chaque jour à la boulangerie, à l'intermarché, peut être l'une de ces six millions quatre cent mille...

Dans l'idée que tu te fais de la relation possible ou envisageable avec telle ou telle personne, dans l'idée de ce que tu vas dire, exprimer, dans la manière dont tu vas envisager d'exprimer ce qui te tient à coeur... Inévitablement tu ne peux que sentir la pesanteur exercée par la réalité de ce nombre de six millions quatre cent mille personnes, et t'interroger... D'autant plus qu'il y a aussi une autre réalité qui "pèse" sans doute encore plus lourd : la réalité du jugement, de la réflexion, du propos "à l'emporte pièce" dans le genre "que tu reçois tel un coup de poing dans la figure"...

Nous sommes que l'on le veuille ou non, que l'on s'en défende ou que l'on s'y complaise, dans une "culture" (je dirais une "sous-culture") de l'émotion, du clivage, du "parti-pris", du "cliché", de la "pensée unique" ; une "sous-culture" de la peur, du "cela ne peut être autrement"...

... Bon, le soir du dimanche 22 avril 2012 à L'Equinoxe, quinzième arrondissement de Paris, où siégeait le Quartier Général de Marine Le Pen ; il était difficile d'imaginer Marine Le Pen entourée de ses "lieutenants" et de ses invités, se dandinant sur la piste de danse sur des chansons et des musiques de Jean Ferrat ou de Léo Férré... à priori...

... Pourtant, en mars 2010 parmi les millions de personnes qui suivirent en direct à la télévision, l'enterrement de Jean Ferrat ; il y avait bien, aussi, un certain nombre de ces "six millions quatre cent mille" personnes qui ont voté Marine Le Pen au 1er tour de l'élection présidentielle en 2012...

... Il y a, dans cette "sous-culture" qui celle de la pensée unique, du cliché, du propos à l'emporte pièce, de la peur, de l'à priori, du parti pris... Il faut le reconnaître, une ambiguité entre ce qui est visible et ne l'est pas, entre la vérité et le mensonge...

Le visible ne peut être nié, et le "non visible" ne peut être mis en évidence que s'il est approché, perçu et reconnu sans déformer ou nier le visible...

un sur cinq

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