Borodino et la Bérézina, 1812

Dans les cérémonies souvenirs de guerres, entre autres celles de ces guerres en lesquelles la France était impliquée, d’avant la première guerre mondiale de 1914-1918 ; l’on ne commémore tout de même pas (il ne manquerait plus que ça) les morts Français de la bataille de Borodino en 1812 en Russie, ni les morts Français de la guerre menée par Napoléon en Espagne en 1809…

 

Tous ces morts là, il ne manquerait plus que l’on leur aurait érigé des monuments ! D’ailleurs, il n’y en point, de tels monuments, à la mémoire des morts de Borodino en 1812 et des batailles en Espagne en 1809…

 

D’aucuns – et ils sont nombreux et dans une certaine mesure ont raison – diront (ou disent) qu’à l’époque, en 1809 et en 1812, “ce sont de pauvres bougres ratissés en masse dans les campagnes françaises par les chefs d’armée de Napoléon, qui ont payé un lourd tribut sur les champs de bataille”… Des champs de bataille qui, il faut le rappeler, ont été ceux de Russie, d’Espagne, pays envahis et en partie occupés un temps (plusieurs mois en 1812 en Russie)…

 

En revanche, les Russes et les Espagnols peuvent, eux, avoir – s’il l’ont fait – érigé des monuments en souvenir de leurs soldats tombés au champ d’honneur pour défendre leur pays, de l’invasion des armées Napoléoniennes en 1809 et en 1812…

 

Bien sûr, oui, des “pauvres bouges”… Mais “pas seulement” puisqu’il y avait dans le “lot” des “grosses têtes”, des maréchaux, des décideurs, des fanatiques de la vision napoléonienne de l’Europe et du monde!

 

Les Français de Napoléon se sont comportés à Moscou en automne 1812, exactement comme les occupants allemands, les nazis et la gestapo qui ont occupé Paris de 1940 à 1944…

 

Alors, les morts Français de Borodino et de la Bérézina… L’on peut s’asseoir sans vergogne sur leurs dépouilles qui d’ailleurs sont restées pourrir dans la neige éparpillées tout le long de la retraite de l’armée de Napoléon à travers la Russie durant l’hiver 1812/1813… Aucune compassion, aucune commémoration, merde !

Bon, on me dira “ tous ces morts, c’est terrible” et “ah ces malheureux soldats de – l’équivalent de nos deuxième classe – qui ont été assaillis et décimés par les cosaques en embuscade”! J’ose le dire “ils ont eu raison les Cosaques! Et Koutouzov il a eu le “bon flair” d’attendre que l’armée de Napoléon s’en aille de Moscou à l’entrée de l’hiver russe !”

 

Ce que je pense de la guerre ? Des guerres en général ? Lorsqu’elles sont menées par des envahisseurs, lorsqu’elles sont des conquêtes, des occupations de territoires d’autres peuples, je suis résolument contre, ce sont des guerres sales, des guerres de prédation… Et le discours qui consiste à dire que ces guerres sont menées pour “apporter la civilisation”, c’est un “discours de merde” que je conspue !

 

En revanche les guerres de résistance à un oppresseur, à un envahisseur, les guerres pour se défendre, je suis “pour”, je les trouve justes et jamais cruelles lorsque ceux qui sont persécutés, pillés, commettent ces actes que l’on qualifie de barbares… Où est-elle la barbarie sinon du côté des envahisseurs ? …

 

Dans notre chant national, la Marseillaise, j’adhère totalement à ces paroles “qu’un sang impur abreuve nos sillons” , Parce que le sang de nos ennemis qui veulent notre peau et attentent à nos libertés, à nos biens, à nos familles, est un sang qu’il ne faut pas hésiter à répandre, à faire couler à en rougir les rivières et les champs et les rues dans les villes !

 

Est-ce que Napoléon a apporté la civilisation en Russie, la Russie des Tsars où, soit dit en passant, des aristocrates et des grands propriétaires déjà du temps d’Alexandre Ier, ont affranchi , du moins certains d’entre eux, leurs paysans du servage, ont construit des hôpitaux et se sont souciés de la vie de leurs gens sur leurs domaines qu’ils ont essayé d’administrer au mieux ?

 

Notre République française (la 5 ème) même avec ses inégalités sociales et ses injustices et ses manquements et ses faiblesses, telle qu’elle est aujourd’hui en 2020, n’a plus grand chose à voir avec “l’idéal” Napoléonien et le régime du premier empire français à l’époque censé prolonger la Révolution française de 1789- 1799… En ce sens que notre république se situe à un tout autre niveau, bien plus haut, que ce premier empire de Napoléon !

D’ailleurs, les peuples Européens de la Bataille des Nations ( Autriche, Prusse, Russie, Angleterre, états allemands ) en 1813, l’avaient déjà compris, que Napoléon et ses armées n’apportaient pas vraiment la civilisation !

 

Notre République, celle d’aujourd’hui, oui, cela vaut le coup de la défendre ! Et d’honorer ceux qui meurent pour elle en la défendant ! De se battre pour ses valeurs même si elle n’est pas au mieux de ce qu’elle devrait être !

 

C’est pas avec de la dentelle, avec des fleurettes de pré, avec des chansons d’amour à pleurer si belles et si émouvantes soient-elles, c’est pas avec des discours de loups se couchant auprès des agneaux, ni de gros minous qui font la gentille papate au petit oiseau qui volète juste à côté, c’est pas avec de la jolie morale, de la philosophie sur fond de conte de fée ; tout ça le froc au bas des chevilles et les yeux baissés, avec des concessions lâches au nom de valeurs de ceci de cela sur fond d’une tolérance qui n’a rien à voir avec celle de Voltaire, que l’on arrivera à faire un monde “meilleur” !

 

Cependant, un “autre regard” ou “angle de vue” s’impose, si l’on considère l’Histoire dans son évolution, ses faits, ses événements, ses périodes troublées, ses temps de paix et de guerres… Un “autre regard” que celui par lequel on voit des conquêtes, des occupations de territoire, des dominations, ou des résistances, des oppositions ou des causes “justes ou injustes”…

 

Il y a, il y a toujours eu les intérêts concordants ou divergents ou opportunistes, des uns et des autres, qui sont ceux des peuples, des partis, des rois (dont les rois de France), des puissants, des gouvernants… Et la géographie qui joue un rôle déterminant, la géographie des territoires et de leurs ressources, la géographie des peuples, de leur mode de vie et de leur culture, la géographie des mouvements de populations, du brassage de ces populations entre elles… La géographie et l’histoire mêlées, dans la formation des pays, des états, des empires…

 

Les sociétés, les civilisations, les peuples, les pays, les états, les empires, se sont faits dans la violence, dans la difficulté, dans la complexité, dans la diversité des situations, dans un mouvement général ou local qui est “d’ordre naturel” ou “universel” si l’on peut dire…

Il se dégage de tout cela, une réalité intemporelle qui porte davantage à réflexion qu’à jugement de ce qui fut, de ce qui s’est passé à telle ou telle époque…

 

Ainsi, ces morts des batailles de Borodino et de la Bérézina en 1812 en Russie, ces soldats de l’armée de Napoléon tombés en 1809 en Espagne, ces morts Français donc… Rejoignent les morts des guerres de Louis XIV et de Louis XV, les morts des guerres de la Révolution Française, les morts des armées de Vercingétorix à Alésia en 52 AV-JC… Et, en fait – et de fait – tous les morts se rejoignent, de partout, de toutes les guerres, de toutes les périodes troublées, de violence, de l’Histoire…

 

Tous les morts se rejoignent qui, si l’on parvenait à les rassembler, ferait une couche de cendres, de poussière, de terre, bien plus haute et bien plus étendue que les cendres qui ont recouvert Pompéï en 79 AP-JC…

 

 

 
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